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Dr Manon AMINATOU, organisatrice près d’Orléans du premier Forum IMP’ACTE : « Remettons les collectivités locales au centre de la Coopération décentralisée Nord-Sud/Sud-Nord »

19 novembre 2023
Dr Manon AMINATOU, organisatrice près d'Orléans du premier Forum IMP'ACTE : « Remettons les collectivités locales au centre de la Coopération décentralisée Nord-Sud/Sud-Nord »
Dr Manon Aminatou devant le Château de Saint-Jean-Le-Blanc, commune du Loiret, près d’Orléans, dont elle est l’élue (© DR)
Présidente de ACTE (Alliance des Communes et Territoire Engagés), la Franco-Camerounaise Manon AMINATOU organise les 24 et 25 novembre à Saint-Jean-le-Blanc (près d’Orléans) le premier Forum de la Coopération décentralisée Nord-Sud/Sud-Nord. Une grande première à laquelle vont participer une trentaine d’élus venus d’une dizaine de pays africains francophones.

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Entretien avec Bruno FANUCCHI
pour AfricaPresse.Paris (APP) @africa_presse

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APP – Quelques mots pour cerner d’abord votre personnalité ?

Dr Manon AMINATOU – Originaire du Cameroun, mais arrivée en France après mon bac en 1997, j’ai poursuivi et achevé mes études à Strasbourg par un doctorat en pharmacologie et je suis aujourd’hui à la fois une scientifique spécialisée en toxicologie et une élue locale.

Après un parcours dans des groupes internationaux spécialisés dans l’industrie pharmaceutique et cosmétique, j’ai créé et dirige depuis plus de dix ans le cabinet VisaTox, spécialiste reconnu de l’expertise toxicologique et réglementaire pour les entreprises et les organismes publics en Afrique et en Europe.
Je suis experte dans l’identification des risques chimiques pour garantir la conformité des biens de consommation et la protection de l’environnement en accord avec les réglementations européennes en vigueur.
Mais je suis aussi, depuis les municipales de 2020, une élue locale dans ma commune de Saint-Jean-le-Blanc, près d’Orléans, dans le Loiret, à une heure seulement de Paris.

APP – Comment est née ACTE et quel est le but de cette association dont vous êtes la Présidente-fondatrice ?

Dr Manon AMINATOU – L’Alliance des Communes et Territoire Engagés (ACTE), que j’ai créée en 2022, est née dans le sillage des relations renouvelées entre l’Afrique et l’Europe qu’avait porté le Sommet Europe-Afrique de Bruxelles, en février 2022, quand Emmanuel Macron présidait l’Union européenne et le Sénégalais Macky Sall l’Union africaine. Les deux présidents avaient exprimé la volonté de renouveler ces relations. Je le faisais déjà au travers de mes activités professionnelles et je me suis dit qu’il fallait approfondir cette voie en se donnant quelques moyens et objectifs concrets.

Cette association regroupe des élus de tous les bords politiques ainsi qu’un certain nombre d’acteurs économiques qui, eux, vont accompagner la mise en place des projets avec des Partenariats Public/Privé (PPP). Notre but premier est de développer une diplomatie et une coopération économique décentralisée.

L’association a pour objectif d’une part de développer les territoires et les bassins d’emploi en intégrant les enjeux sociétaux, et tout particulièrement la santé, l’accès et la qualité de l’eau ainsi que l’environnement. Elle prône d’autre part un cadre de respect mutuel dans les échanges et des accords équilibrés entre les acteurs des secteurs privé et public Nord-Sud, Sud-Sud et Sud-Nord.

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« Il faut associer les diasporas car
nous avons besoin de toutes les forces vives »

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APP – L’événement que vous organisez les 24 et 25 novembre dans votre commune de Saint-Jean-le-Blanc constitue donc une grande première ?

Dr Manon AMINATOU – C’est parfaitement exact. Sous l’appellation d’IMP’ACTE, nous avons créé un concept original et tout à fait unique sur le territoire. C’est de faire un Forum qui s’articule en deux temps : une première journée avec des échanges et débats en présentant des rôles modèles pouvant inspirer les collectivités et une seconde journée consacrée à la formation, car c’est toujours important d’être bien formés. Une formation destinée à la fois aux élus et agents territoriaux, concernant notamment la gestion de la ville et la gestion de projets internationaux.

Dr Manon Aminatou lors de son intervention au Salon Afrique Unie de Cotonou (9-11 novembre 2023). © DR

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APP – Mais avec un regard complètement neuf ?

Dr Manon AMINATOU – Je fais, en effet, le constat que les échanges sont inégaux entre les pays du Nord et les pays du Sud. Je vous en donne deux exemples bien précis :

1/ Quelque 10 % des pays les plus riches de la planète sont responsables quand même de la moitié des émissions cumulées de gaz à effets de serre, de 1990 à aujourd’hui ;

2/ La moitié des matériaux qui sont consommés dans les pays du Nord viennent des pays du Sud et il me semble nécessaire de changer ce paradigme pour transformer ces matières premières dans les pays du Sud également, afin qu’ils puissent en retirer une plus-value locale et accélérer ainsi leur développement.

Nous n’avons donc pu que constater un certain échec dans nos relations Nord-Sud. Je m’adosse au principe de subsidiarité en disant : pour que nos relations soient plus fructueuses, il faut aller sur les territoires, en associant les communes que l’on va retrouver dans tous nos pays, les acteurs économiques de ces territoires-là qu’il faut impliquer dans leur développement, mais également les diasporas de tous les horizons ; les diasporas du Nord que l’on retrouve dans le Sud et inversement.

C’est important car on oublie trop souvent que les Français expatriés dans des pays africains ne sont pas forcément impliqués dans le développement de ces territoires, alors que c’est une force à la fois diplomatique et sûrement économique. Et nous avons besoin de toutes les forces vives.

APP – Quel est le programme de ce premier Forum IMP’ACTE ?

Dr Manon AMINATOU – Ce Forum va se dérouler sur deux jours. Le 24 novembre avec conférences et débats, ainsi qu’une présentation du rôle modèle de la Région Centre Val de Loire. Nous avons, en effet, à St Denis de l’Hôtel une laiterie qui porte en son sein un principe d’intégration et de développement de l’humain au centre de ses actions et un volet de RSE (Responsabilité sociétale des entreprises) qui agit déjà avec une entreprise africaine. Il sera donc intéressant de montrer que, sur notre territoire, nous avons des acteurs économiques qui s’activent dans ce sens.

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« Le bel exemple
du Centre Songhaï de Porto-Novo »

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APP – Et vous prenez parfois exemple sur ce qui se fait déjà en Afrique ?

Dr Manon AMINATOU – Notre second modèle nous vient en effet du Bénin : c’est le Centre Songhaï, que j’ai eu plaisir de visiter il y a quelques jours à Porto-Novo la capitale. C’est un Centre agro-écologique, qui existe depuis 1985 et devrait franchement être dupliqué sur tous les territoires. Pourquoi ? En économie circulaire, il intègre à la fois la production animale, végétale et la pisciculture dans un circuit fermé, avec la valorisation des déchets en énergie qui permet d’alimenter l’usine de production. Ferme en totale autonomie, on y transforme les produits maraîchers, bananes plantains et jus de fruits.

Mais il délivre aussi une formation à toute personne qui veut apprendre en ce domaine et cela me plaît beaucoup. Des représentants de plusieurs pays africains (comme le Nigeria, la Gambie ou le Mali) y viennent pour s’inspirer du bel exemple du Centre Songhaï et faire la même chose sur leurs territoires. C’est pour nous un modèle phare et même la Région Île-de-France y avait envoyé des stagiaires. Pour cette première édition du Forum IMP’ACTE, il fallait absolument que ce Centre Songhaï soit présent.

APP – Vous donnez toujours une grande importance à la formation ?

Dr Manon AMINATOU – La deuxième journée du Forum sera en effet consacrée à la formation : formation des élus et agents territoriaux. Elle sera dispensée d’une part par le Syndicat National des Directeurs Généraux des Collectivités Territoriales, et d’autre part par le Centraider qui accompagne les structures à la mise en place de leurs projets.

APP – Combien d’élus africains seront présents pour cette première édition ?

Dr Manon AMINATOU – Nous allons accueillir pour la première fois une trentaine d’élus africains, dont les deux tiers sont des maires et le dernier tiers des opérateurs économiques, qui tous sont venus à leurs frais. Ils viendront d’Afrique francophone, notamment du Cameroun bien sûr, même s’il est bilingue, du Sénégal avec une forte délégation, de Mauritanie, de Guinée Conakry, du Gabon, du Maroc, du Togo et du Bénin. Nous avons eu quelques problèmes de visa, mais ils ont pu être réglés.

Le but, pour nous, est aussi de sensibiliser maintenant les élus de la Région Centre Val de Loire pour qu’ils soient présents et rencontrent leurs homologues africains qui viennent parfois avec des solutions car nous souhaitons de nouvelles relations avec l’Afrique, des relations équilibrées et respectueuses qui pourraient se résumer en trois mots : confiance, considération et coopération.

APP – Et d’autres régions françaises sont également associées à cette belle aventure ?

Dr Manon AMINATOU – Devraient être représentées la région Grande Aquitaine, l’Île de France bien sûr et, je l’espère, l’Alsace même si ce n’est pas encore certain.
À chaque fois, nous soulevons une problématique et nous apportons en face une solution. Pour notre Région Centre Val de Loire, qui est une région céréalière, nous pourrions nous inspirer de l’Afrique du mil et du sorgho. Et nous leur ferions découvrir en échange notre gestion des déchets, car nous avons ici d’excellents centres de tri.

APP – Pourquoi ne pas avoir fait ce Forum à Paris ?

Dr Manon AMINATOU – J’aurais pu en effet organiser ce Forum à Paris, peut-être à l’Assemblée Nationale, mais j’ai souhaité le faire en province, dans une petite commune de 10 000 habitants, car j’estime que c’est important que les territoires se réapproprient la Coopération décentralisée.

Une Coopération qui aura des impacts locaux avec :
1/ La création d’emplois aussi bien ici que là-bas, ce qui contribuera à la lutte contre le chômage ;
2/ La multiplication et le développement de nouveaux liens sociaux entre nous tous ;
3/ La réduction mécanique d’une immigration sauvage si les Africains trouvent un emploi dans leur propre pays.

J’adresse un grand merci à la Région Centre Val de Loire d’avoir subventionné en partie ce premier Forum IMP’ACTE qui entend remettre les territoires et les collectivités au centre de la Coopération décentralisée.

EN SAVOIR PLUS :
www.acteafriqueeurope.com

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INSCRIPTIONS OUVERTES à notre XIe Conférence
des Ambassadeurs Africains à Paris, le 28 novembre

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