J.-F. Limantour –
Une « balle dans le pied » des dirigeants politiques tunisiens, c’est dommage !
Grand connaisseur du sud méditerranéen où il entretient depuis de nombreuses années d’intenses relations professionnelles, en sa qualité de Président du CEDITH, Jean-François Limantour montre ici sa déception vis-à-vis des récentes déclarations de responsables politiques tunisiens, et notamment celles du Président Moncef Marzouki, au Journal du Dimanche (ici le texte intégral) du 18 décembre 2011…
Photo ci-dessus : Jean-François Limantour, Président du Cercle Euro-méditerranéen des Dirigeants Textile-Habillement (CEDITH)
© Alfred Mignot - novembre 2009
La Tunisie doit éviter de faire fuir
les investisseurs et les touristes
Tribune Libre
par Jean-François LIMANTOUR
Président du Cercle Euro-méditerranéen
des Dirigeants Textile-Habillement (CEDITH)
À ses tout premiers débuts, la « révolution du printemps arabe » a suscité l’espoir des populations pour des lendemains meilleurs et provoqué un large mouvement de sympathie et de soutien de la part des pays occidentaux, car elle véhiculait des idées séduisantes de démocratie, de liberté, de dignité et d’emploi ; bref, elle signifiait la fin des chapes de plomb imposées pendant des décennies par des régimes corrompus et dictatoriaux… et l’espoir d’une ère nouvelle de relative prospérité pour tous !
Pourtant, ce mouvement révolutionnaire suscite maintenant beaucoup d’interrogations et provoque une inquiétude croissante en Europe, nourrie par la multiplication de signaux négatifs, voire intolérables, émanant non seulement de salafistes obscurantistes, mais aussi de responsables islamistes supposés modérés : déclarations contre la mixité dans les écoles et dans les lieux publics, mise en cause du statut des femmes, intimidations et actes criminels contre des journalistes jugés « mécréants », actions musclées pour le port du voile intégral (niqab) par les étudiantes, exhortation pour un sixième califat de droit divin et pour l’application de la Charia, etc… Bref, tous les signes d’un islamisme radical rampant et liberticide.
À ceci s’ajoutent des attaques à connotation anti-française, telles que « le français pollue la langue arabe » selon Rached Ghannouchi, le chef du parti tunisien Ennahdha, ou encore cette déclaration du tout nouveau Président de la République de Tunisie, Moncef Marzouki, au JDD du 18 décembre 2011, à propos de la France, « l’esprit colonial, c’est fini ».
Très important partenaire économique de la France, la Tunisie a connu une année 2011 particulièrement difficile, émaillée de grèves en cascades et de sit-in, ponctuée de violences, d’actes de vandalisme et de couvre-feu, marquée d’incertitudes politiques, sur fond de chasse aux sorcières ! Résultat, les clignotants économiques passent au rouge et le chômage explose ; selon la présidente du patronat tunisien (Utica), il touchera un million de personnes à la fin du mois de décembre 2011, soit environ 25 % de la population en âge de travailler !
Et dans une entrevue récente accordée au magazine African Manager, le Gouverneur de la Banque Centrale de Tunisie (BCT), estimait, parlant de 2012, que le pire est à venir.
On ne s’en étonnera pas car les exportations, principal moteur de l’économie tunisienne, vont être très affectées par la récession qui menace l’Europe ; mais aussi parce que les désordres sociopolitiques actuels de la Tunisie risquent de faire fuir vers d’autres pays plus accueillants, comme le Maroc, les investisseurs européens et les touristes dont la Tunisie a pourtant un besoin vital pour faire tourner son économie.
Gardons cependant confiance, car les dirigeants politiques tunisiens s’apercevront peut être qu’ils se tirent une balle dans le pied en agissant de la sorte… et parce que si ce n’était pas le cas, les électeurs tunisiens, conscients d’avoir été « roulés dans la farine », ne manqueraient pas de les sanctionner sévèrement dans un an, à l’issue de la période transitoire, pour remettre la Tunisie sur les bons rails, ceux de la prospérité, de la tolérance, de la laïcité et d’une coopération renforcée avec l’Union européenne, dont la France.
Jean-François LIMANTOUR
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