Tania-Bénédicte M’BAKA, PDG de Naman & Guili : « La Responsabilité Sociétale des Organisations (RSO) est un outil stratégique pour conduire le développement durable »
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Une contribution de Tania-Bénédicte, MBAKA*
PDG de Naman & Guili (expertise Impact / RSO)
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D’aucuns font aujourd’hui montre d’humeur négative envers la responsabilité sociétale, dont ils disent qu’elle serait à l’origine de l’appauvrissement des entreprises, alors même que, comme chacun s’emploie aujourd’hui à le reconnaître, un important effort de renaissance industrielle en France ou d’émergence industrielle en Afrique doit être manifestement accompli.
Les normes ESRS (European sustainability reporting standards), parmi lesquelles les normes de production, sont ainsi décriées par des entrepreneurs militants, comme autant de complexité et de charges administratives supplémentaires. Pourtant, chacun sait qu’il faut impérativement s’attacher à jouer « collectif », suivant un nouveau modèle de société (produire et consommer local).
La Responsabilité sociétale des organisations (RSO) a, de ce point de vue, un rôle déterminant à jouer, particulièrement vis-à-vis d’un processus d’’industrialisation (renaissance industrielle en France / émergence industrielle en Afrique), pour lequel elle doit pouvoir servir de guide stratégique pour le développement durable.
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Distinguer RSE et RSO
Distinguer RSE et RSO
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Dans un contexte général où les enjeux sociaux et environnementaux sont de plus en plus prégnants, la RSO permet en effet aux acteurs impliqués dans une politique comme l’industrialisation de prendre des décisions et de mener des actions conformes aux accords de Paris et donnant plein sens aux normes nationales et internationales telles que la CSDD, la CSRD, le MACF…
Rappelons que la RSO – moins connue que la RSE (responsabilité sociétale des entreprises) dont elle se distingue – est une approche simplifiée des organisations, qui permet à ces dernières d’intégrer les préoccupations sociales, environnementales, éthiques et également de durabilité dans la gouvernance des activités économiques qu’elles gèrent.
En comparaison de la RSE qui se traduit essentiellement par la constitution d’un pôle développement durable dans l’entreprise, la RSO est le langage commun permettant de piloter la gouvernance des organisations (c’est-à-dire y compris les collectivités et les entreprises) autour de pratiques de management durables et responsables, comme : « Tous autour de la table ; décloisonnement des services ; minimisation des risques ; accélération de la performance durable… ».
La RSO est donc un outil stratégique qui vise à permettre à la gouvernance de construire un modèle de société plus inclusif et un accompagnement des organisations dans leur démarche de développement économique durable, compte tenu du cadre normatif existant (en particulier, les 41 sujets définis par la CSRD par rapport aux objectifs pour 2050 : baisse des émissions de carbone / maîtrise du gaz à effet de serre…) et des moyens financiers qu’il est possible de mobiliser.
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Un investissement rentable
Un investissement rentable
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La RSO se traduit ainsi par la définition opérée par les organes de gouvernance (COPIL / COMEX) de l’organisation, d’un plan stratégique et aussi d’une vision extra-financière permettant d’intégrer les ODD (objectifs du développement durable) :
Une fois défini, le plan stratégique peut être décliné auprès des managers de l’organisation pour une diffusion auprès des personnels, afin notamment de donner du sens à leurs tâches grâce à un engagement plus résolu dans le développement durable ;
Une fois construite, la vision peut être partagée par les différents services de l’organisation, qui peuvent alors s’employer à valoriser ses aspects extra-financiers, immatériels
Dans le cadre de la dynamique d’industrialisation, la RSO est ainsi un investissement rentable, car elle conduit à :
1 - La promotion du développement durable, au travers de la mise en application de normes harmonisées : en tant qu’outil de pilotage stratégique, la RSO conduit les organisations à réduire leur impact environnemental, en favorisant l’efficacité énergétique, en promouvant la gestion responsable des ressources naturelles et en soutenant l’économie circulaire.
L’industrialisation peut être ainsi responsable si, dans le respect des textes réglementaires, elle assure la préservation des écosystèmes et minimise les risques liés aux changements climatiques
2 - Le renforcement des droits humains, particulièrement dans les chaînes d’approvisionnement et d’achats, grâce à l’intégration de la CSDD dans la gouvernance opérationnelle : on évoquera en particulier la lutte contre le travail des enfants, la garantie de conditions de travail décentes, le respect de la diversité et de l’égalité des chances.
Avec ces principes, l’industrialisation peut donc contribuer à l’amélioration des conditions de vie des travailleurs, tout en favorisant une croissance soutenable impliquant l’ensemble de la chaîne de valeur (« tous responsables »).
3 - L’amélioration de l’image de marque et de la réputation : en allouant des investissements qui ne soient ni ambigus ni du simple greenwhashing, les organisations affichent clairement leur positionnement, qui leur permet d’être mieux perçues par les consommateurs, les investisseurs et les partenaires commerciaux, avec en définitive un impact positif sur la réputation et la rentabilité de l’entreprise.
4 - La réduction des risques et des coûts environnementaux, sociaux et juridiques : la mise en place d’une stratégie de pratiques durables, passant par des mesures préventives, comme la gestion responsable des ressources naturelles, la réduction des émissions de gaz à effet de serre et la garantie de conditions de travail sûres, les organisations et entreprises évitent des coûts liés à d’éventuelles sanctions ou amendes, ainsi que des litiges ou des réputations négatives.
5 - L’accès à de nouveaux marchés et opportunités commerciales : en répondant à la demande croissante des consommateurs pour des produits et services durables, la RSO offre des opportunités commerciales (nouveaux marchés, nouveaux clients).
Aussi, en se différenciant de la concurrence, la RSO favorise l’innovation, avec de nouveaux produits, services et modèles qui favorisent l’inclusion des populations.
6 - L’attraction des talents et la fidélisation des personnels : en renforçant l’implication des employés autour de valeurs éthiques et durables, la RSO renforce leur engagement et contribue à une meilleure productivité au sein de l’organisation.
Aussi, en tant qu’employeur reconnu comme responsable, l’organisation ou l’entreprise bénéficie d’une meilleure réputation sur le marché du travail, ce qui facilite le recrutement et le retour des meilleurs talents.
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Les freins à surmonter
Les freins à surmonter
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Mais de nombreux freins à l’inclusion de la RSO doivent être encore surmontés :
1. Tout d’abord, la mise en place de pratiques responsables implique des coûts initiaux plus élevés pour les entreprises et organisations, notamment en termes d’investissements dans des technologies plus propres, de formation du personnel et de certification.
Pour autant, les avantages de la RSO sur les moyen-long termes sont indéniables, avec la réduction des coûts d’exploitation et l’amélioration de l’image de marque, qui font plus que compenser les coûts initiaux. Les DAF doivent donc voir au-delà du court terme et désormais considérer ces données extra-financières comme un investissement et non plus comme une dépense.
2 - Ensuite, la RSO paraît être un domaine complexe et en constante évolution, avec sa multitude de normes, cadres et certifications, qui ne sont pas toujours bien harmonisées au plan mondial. Là encore, il faut voir au-delà de cette complexité apparente et faire de la RSO un acquis pour l’organisation.
3 - Enfin, on évoquera la résistance au changement, qui est consécutive au manque de sensibilisation sur les avantages à long terme de cette approche. Il faut donc pouvoir assurer une communication efficace pour contribuer à surmonter cette résistance, en particulier dans le secteur privé qui a un rôle moteur pour le changement positif de la société, avec un effet multiplicateur sur l’économie.
Rappelons en effet que les entreprises qui mettent en place des chaînes d’approvisionnement durable et favorisent l’innovation, contribuent grandement à la création d’emplois, à la croissance économique durable et à la compétitivité des pays. De leur côté, les organisations de la société civile et les gouvernements, renforcent avec la RSO la coopération et l’efficacité des politiques publiques qui contribuent à renforcer durablement la souveraineté.
Il faut aussi pour cela un cadre législatif incitatif, reposant sur la transparence et la création de mécanismes de responsabilité comme des performances RSO des entreprises (moyennant la CSRD et la CSDD), ainsi que sur des incitations pour les pratiques durables, un encouragement des partenariats public-privé.
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*Tania-Bénédicte M’BAKA, PDG NAMAN & GUILI - Études RSO, et Présidente de l’ONG FANGE de lutte contre l’immigration climatique – Après vingt années dédiées au développement du capital humain dans des grands groupes français et internationaux du secteur financier, Tania-Bénédicte M’BAKA s’est spécialisée dans l’accompagnement à la conduite du changement stratégique des organisations par l’intégration de la RSO.
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