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SE Henok TEFERRA, Ambassadeur d’Éthiopie à Paris : « Pour réussir, nous devons défendre ardemment l’intégration africaine »

7 juin 2022
SE Henok TEFERRA, Ambassadeur d'Éthiopie à Paris : « Pour réussir, nous devons défendre ardemment l'intégration africaine »
Invité d’honneur au récent déjeuner-débat des « Voix africaines » qu’anime avec brio Mme Joëlle Bonnefous, l’ambassadeur d’Éthiopie Henok TEFERRA a séduit par son franc-parler et sa bonne humeur. Au menu : un tour d’horizon informel sur l’Éthiopie, cet ancien empire millénaire d’Afrique de l’Est, si méconnu en France…

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par Alfred MIGNOT, AfricaPresse.Paris (APP)
@alfredmignot | @africa_presse

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Avec ses 112 millions d’habitants (2e en Afrique, après le Nigeria) et une surface de 1 127 127 km2, l’Éthiopie – en forme longue, la République démocratique fédérale d’Éthiopie – est le grand pays de la Corne de l’Afrique.
Considéré comme l’un des berceaux de l’humanité – on y a découvert Lucy, en 1974 – cet État constitutionnellement laïc fut le second, après l’Arménie, à adopter le christianisme, rappelle Son Excellence Henok Teferra. L’Ethiopie est aussi une des premières terres d’Islam, et aujourd’hui plus d’un tiers de la population est musulmane. Le pays comprend également d’autres religions, comme les Beta Israël et les croyances animistes – au final, cette diversité et coexistence religieuse, durant des siècles, est une source de tolérance qui peut servir de modèle, relève l’ambassadeur.

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Presque trois mille ans d’histoire
ponctués par les guerres

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« Pourquoi votre pays est-il si pauvre ? », questionne sans détour Mme Joëlle Bonnefous…
C’est à la profondeur historique presque tri-millénaire de son pays que Son Excellence Henok Teferra fait appel pour proposer des éléments de réponse. L’histoire de l’Ethiopie commence en effet avec le Royaume de D’mt, dès le VIIIe siècle avant J.-C., se poursuit durant quatorze siècles avec le Royaume d’Aksoum (IVe s. av. J.-C. - Xe siècle) et continue avec les mille ans de l’Empire éthiopien, de 990 à 1974…

Ainsi l’Éthiopie est-elle une entité très ancienne – et par ailleurs le seul pays d’Afrique à ne pas avoir été colonisé – mais ses trois mille ans d’histoire ont été ponctués par des guerres incessantes de luttes pour le pouvoir.
C’est encore le cas à notre époque, depuis la chute de l’empereur Hailé Sélassié en 1974 jusqu’à l’actuel conflit dans la province du Tigré, déclenché en novembre 2020 par le Front de Libération du Peuple du Tigré (TPLF), qui a exercé une dictature sur le pays pendant 27 ans avant d’être chassé du pouvoir par la volonté populaire, à la suite de manifestations de grande ampleur dans les régions de l’Oromia et de l’Amhara.

Arrivés au pouvoir en 2018, l’actuel Premier Ministre Abiy Ahmed et son équipe affirment leur volonté de démocratiser ce vieux pays et de libéraliser son économie. Afin de pacifier le pays, le gouvernement fédéral a décrété en mars dernier une trêve unilatérale dans le conflit du Tigré. Mais le TPLF a poursuivi ses attaques dans les régions voisines d’Afar et d’Amhara, compromettant encore l’espérance d’une paix prochaine.

« Ces guerres, et particulièrement celles du XIXe siècle, nous ont fait rater le train de l’industrialisation et de la modernisation, observe l’ambassadeur Teferra. Et chacun sait que la guerre ne crée pas la richesse, elle la détruit », ajoute-t-il, observant encore que les tentatives de modernisation des débuts du long règne (54 ans) de l’empereur Haïlé Sélassié Ier n’ont pas produit les résultats escomptés.

Une vue partielle des convives. De gauche à droite sur la photo : Mme Jocelyne Duval, fondatrice d’Aponie ; SE Henok TEFERRA, Ambassadeur d’Éthiopie ; Denis Deschamps, Délégué général de la CPCCAF ; l’ancien ambassadeur français Nicolas Normand ; Alfred Mignot, directeur AfricaPresse.Paris : Bruno Fanucchi, Grand Reporter AfricaPresse.Paris ; Mme Selena Souah, co-fondatrice Regcard ; Massoma Diomandé, Conseiller financier ; Mme Joëlle Bonnefous, présidente de Voix Africaines. © DR

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Trois priorités pour
construire l’avenir

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En finir avec le cycle des guerres et « établir un processus démocratique et pacifié d’exercice et de passage du pouvoir est l’une des trois priorités de notre pays, c’est essentiel pour l’émergence d’un État moderne », relève l’ambassadeur.

« La seconde priorité est d’améliorer la gestion de la terre : historiquement possédée par la minorité de la noblesse, elle a été nationalisée par le régime communiste (1974-1991)… L’utilisation efficiente de la terre est essentielle dans l’effort de modernisation de l’agriculture. Depuis trois ans des efforts considérables ont été accomplis en termes de gestion efficiente de la terre et de production agricole, notamment avec le soutien de la Banque Africaine de Développement (BAD), à tel point que l’Éthiopie deviendra un pays exportateur de blé dès 2023.

Le troisième défi à relever est celui de la question nationale, c’est-à-dire la gestion de la diversité des communauté. Nous œuvrons pour la mise en place d’une fédération multinationale authentiquement démocratique, où les droits humains, individuels et collectifs, sont réellement respectés.

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Pour l’intégration
africaine

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Ayant longtemps vécu « dans l’entre-soi entre nos montagnes », l’Éthiopie n’en est pas moins l’un des pionniers du panafricanisme, et sa capitale Addis Abéba accueille d’ailleurs logiquement le siège de l’Union africaine.

« Pour réussir, nous devons défendre ardemment l’intégration africaine, car cela permet de créer l’échelle nécessaire en termes de marché. Ayant travaillé pour les compagnies aériennes, je sais que le succès d’Ethiopian Airlines tient à sa stratégie panafricaine.
Le volume compte aussi ! C’est d’ailleurs une condition essentielle pour avoir des champions africains : pour la réussite de l’Afrique, il nous faut nos propres multinationales, capables à la fois de produire et de consommer localement, mais aussi d’exporter, de développer des marchés internationaux. Ethiopian Airlines prouve que c’est possible », argumente SE Henok TEFERRA.

L’ambassadeur se positionne aussi comme un ardent adepte de la ZLECAF. Selon lui, le développement ne viendra qu’avec, entre autres, la mise en application de la ZLECAF, le traité continental de libre-échange acté en 2020 : « Maintenant nous devons le mettre en œuvre concrètement. C’est l’heure du test de notre volonté réelle, politique, de développer notre continent. Si on échoue sur ce projet, on n’aura pas d’excuse. Nous devons réussir ! »

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CMAAP 3 / REPLAY - S.E. Mme Ruth TSHOMBE, Ambassadrice RD CONGO, Lionel ZINSOU, Mohamed ZOGHLAMI : les industries créatives sont « un gisement d’emplois et de ressources très important pour l’Afrique »

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CMAAP 2 / REPLAY - « Comment contribuer au développement de l’agriculture africaine ? », avec S. E. Mme Liliane MASSALA, Ambassadrice du Gabon, et S. E. André-Magnus EKOUMOU, Ambassadeur du Cameroun

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CMAAP 1 / REPLAY - « COMMENT MIEUX FINANCER L’AFRIQUE ? », avec SE Maurice BANDAMAN, Ambassadeur de La Côte d’Ivoire »

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