Philippe de Fontaine Vive : « Aix-Marseille-Provence a les atouts pour devenir la porte européenne vers la Méditerranée et l’Afrique »
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Une contribution de Philippe de Fontaine Vive
Vice-Président honoraire de la Banque Européenne d’Investissement (BEI) et fondateur de Massilia Mundi
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Au moment où se débattent les questions municipales et où se profilent les enjeux métropolitains, il paraît de plus en plus clair que le rayonnement international participe à des ambitions et des responsabilités qui s’exerceraient mieux au niveau collectif que dans la compétition entre toutes les communes, les intercommunalités, le département et la région. Ce rayonnement international est surtout au cœur du succès d’une métropole qui doit susciter fierté de ses habitants mais aussi respect et intérêt des investisseurs, des influenceurs, des artistes et de tous les faiseurs d’opinion...
Aix-Marseille Provence dispose aujourd’hui des atouts qui peuvent faire de cette métropole un des acteurs majeurs méditerranéens et africains : champions maritimes et de nouvelles technologies, représentations d’institutions internationales, nationales, centres de recherche, réseaux, infrastructures, patrimoine…
La Région Sud a déjà saisi l’opportunité de la décentralisation européenne pour revivifier son développement, c’est au tour de Marseille et de la métropole de devenir le môle de développement de l’Europe vers l’Afrique et la Méditerranée.
Marseille, seconde place internationale de France
Marseille est d’ores et déjà une véritable Place diplomatique qui s’ignore, étant la seule ville de France, hors de Paris, où sont représentés la Commission européenne, le Parlement européen et près de 80 pays avec des consuls professionnels ou honoraires.
Marseille est également la seule ville dans le monde à disposer, sans être une capitale nationale, d’une présence de la Banque mondiale grâce à la fédération d’acteurs publics engagés en Méditerranée (BEI, AFD, CDC et surtout Égypte, Liban, Maroc et Tunisie) avec le Centre méditerranéen d’intégration (CMI).
Elle est également le siège de l’Agence des villes et territoires méditerranéens (Avitem) qui en fait le meilleur centre d’échange des expériences locales et de formation des personnels. Pour la formation, elle accueille aussi le Centre d’études financières, économiques et bancaires (Cefeb) que l’Agence Française de Développement pourrait encore fortement développer pour accompagner sa priorité environnementale en Afrique.
Grâce aux efforts déjà déployés par les réseaux d’économistes méditerranéens (Femise), des écoles de commerce ou d’ingénieurs, des agences nationales d’investissement fédérées dans Anima, et enfin plus largement des milieux économiques, toute une base est là, prête à devenir le môle de la coopération avec l’Afrique et la Méditerranée.
Des initiatives nombreuses mais dispersées
Avec le tournant des années 2000, Marseille a multiplié les initiatives qui lui apportent une renommée diffuse : les Rendez-vous économiques de la Méditerranée, la Semaine économique de la Méditerranée en octobre, les Journées annuelles du cercle des économistes à Aix en juillet, les rencontres d’Averroès, les séminaires du CMI , les formations de l’École de la deuxième chance – qui font écho avec le réseau méditerranéen de la nouvelle chance –, l’Institut de la Méditerranée qui a débouché sur la naissance de l’Institut des villes durables.
D’autres projets sont encore en genèse, comme la Maison de la sagesse portée par l’Institut catholique de la Méditerranée [et la Maison de l’Afrique, dont la création en 2021 a été récemment annoncée par Africa Link, ndlr]. Ce foisonnement reflète bien la vitalité et l’imagination marseillaise, mais aussi sa difficulté à structurer des démarches collectives.
Seule la dimension métropolitaine et régionale
est à la hauteur des enjeux
Vues de New York ou de Shanghai, les particularités au sein de la métropole ou de la région ne sont pas perceptibles, ni compréhensibles. Au moment où la France cherche à redonner de la vitalité aux territoires et où l’Europe doit retisser des liens de proximité, il est urgent que la région et la métropole se concertent pour définir cette confédération nécessaire en y associant fortement acteurs économiques et culturels, comme cela avait été illustré par l’initiative de 2013 faisant de Marseille-Provence la capitale européenne de la culture.
La nécessité d’une volonté politique nationale
Tous ces atouts ont jusqu’ici buté sur la volonté jacobine : réussir le lancement de l’Union pour la Méditerranée (UpM) s’est fait au détriment de Marseille, car il a fallu pour obtenir le ralliement de l’Espagne accepter de placer le siège institutionnel à Barcelone et non en France, qui était pourtant la seule à porter l’UpM ; quand Paris à nouveau avec les printemps arabes a voulu relancer le processus méditerranéen, c’est Deauville et non Marseille qui a été choisie pour accueillir le sommet, cette fois pour des raisons de sécurité et encore plus récemment à nouveau pour les mêmes raisons pour parler d’Afrique, c’est Biarritz qui a été choisie [et Bordeaux, qui accueillera le sommet Afrique-France en juin prochain].
Comme la volonté de retrouver Marseille des grandes heures est claire, il faut concrétiser enfin la volonté nationale d’en faire la ville du développement, notamment vers l’Afrique et la Méditerranée. N’oublions que Gaston Defferre avait demandé le transfert à Marseille de ce qu’est aujourd’hui l’Agence Française de Développement, mais les réticences parisiennes ont arrêté le déménagement de la Madeleine à la gare de Lyon… et seul le Cefeb est venu sur Marseille. La République peut aller plus loin si elle le veut, comme elle l’a fait pour déplacer l’Institut de Recherche et Développement (IRD) à Marseille.
La tenue du Sommet des deux Rives à Marseille
en 2019, un choix de bon augure ?
La Région Sud a adopté un plan climat, la métropole pourrait le faire et Marseille devenir la référence et le centre de formation et d’expérimentation pour tous les acteurs méditerranéens et africains. Au moment où l’insécurité gagne en Méditerranée et où les Africains demandent à l’Europe de passer des discours aux actes, Aix-Marseille Provence peut devenir le môle de la coopération en matière universitaire, en nouvelles technologies, comme elle l’est déjà en matière maritime avec les câbles sous-marins ou avec le succès d’Orange, du stade vélodrome aux services bancaires en Afrique.
Tous les liens doivent être renforcés et les énergies mieux connectées. Un site comme « thecamp » [qui accueille la manifestation Emerging Valley, voir notre dossier, ndlr] attend d’être pleinement utilisé ; le site du Palais du Pharo à Marseille, qui accueille déjà l’Université Aix-Marseille, dispose encore de ressources pour accueillir les énergies africaines et méditerranéennes.
Localement un partenariat métropole-région est à portée de main. Nationalement, il est possible de déléguer un ambassadeur pour animer ce partenariat nouveau, de localiser de grands événements à Marseille ou d’y faire un passage systématique, comme l’a fait le Président chinois. Vu de loin, Aix-Marseille Provence est le débouché naturel de la route de la Soie et le passage évident entre Europe et Afrique. Il appartient aux décideurs politiques et économique d’en faire une réalité en voyant grand, et loin.
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Éditée avec l’aimable accord de l’auteur, cette tribune a fait l’objet d’une première publication sur le site marseillais http://destimed.fr/
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