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Les drôles de manières de l’UE en Afrique : Abshir Aden Ferro dénonce à Bruxelles un véritable « Somaliegate » !

8 février 2023
Les drôles de manières de l'UE en Afrique : Abshir Aden Ferro dénonce à Bruxelles un véritable « Somaliegate » !
Bien avant le « Qatargate », l’entrepreneur et homme politique somalien fut l’un des premiers « lanceurs d’alerte ». Dès 2015, il avait découvert de curieuses pratiques de l’UE dans un marché avec la Somalie. Le message qu’il délivre à nouveau à Bruxelles est clair : il faut assainir les relations d’affaires entre l’Europe et l’Afrique pour repartir sur de nouvelles bases.

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De notre envoyé spécial à Bruxelles,
Bruno FANUCCHI pour AfricaPresse.Paris (APP)
@africa_presse

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Pour les questions européennes, les choses prennent toujours plus d’importance et ont plus d’écho à Bruxelles où siègent à la fois le Parlement européen et la Commission européenne ainsi que toutes les institutions et administrations de l’Union.
C’est donc « au cœur de l’UE » qu’Abshir Aden Ferro – entouré de ses deux avocats français – est venu porter le fer et délivrer un message on ne peut plus clair. Ce que le « Qatargate » – mis à jour à l’occasion de la dernière Coupe du monde de football – a révélé de « certaines pratiques » en cours à Bruxelles, au sein des différentes instances européennes, n’est pas vraiment nouveau.

Patron de la société « Fort Roche » (implantée en Grande-Bretagne depuis plus de vingt ans, très active et reconnue dans le domaine de la sécurité), l’entrepreneur somalien, qui a fait de la « lutte contre la corruption » son combat politique, en a fait l’amère expérience. Dans son propre pays, bien sûr, où la corruption est endémique, comme il l’écrivait dans son livre autobiographique « Ma Vie pour la Somalie » (*), mais aussi à l’autre bout de la chaîne – à Bruxelles par exemple - tant il est vrai qu’il ne peut y avoir de « corrompus » sans corrupteurs.

« Mon groupe a d’ailleurs intenté depuis sept ans un procès lors de l’attribution d’un marché de sécurité en Somalie et se pourvoit en cassation afin de faire reconnaître et juger certaines habitudes bruxelloises plus que condamnables. Je peux en témoigner », rappelle-t-il d’emblée, en qualifiant cette affaire de véritable « Somaliegate » dont les instigateurs démasqués devront répondre de leurs actes comme pour le « Qatargate ».

Dans ce dernier scandale éclaboussant les institutions de l’UE, le Parlement européen avait aussitôt décidé de mettre un terme aux fonctions de Vice-Présidente de la députée socialiste grecque Eva Kaili prise en flagrant délit de faits avérés de « corruption » avec plus de 150 000 euros retrouvés à son domicile et elle est toujours en prison en détention provisoire. « Il est temps de nettoyer les écuries d’Augias », avait alors lancé en séance le député européen Raphaël Glucksmann.

Abshir Aden Ferro en pleine argumentation. © DR

En ouverture de cette conférence de presse à Bruxelles, Me Xavier Argenton, son conseil du Barreau de Paris, rappelle la genèse des faits : « M. Abshir Aden Ferro a été approché pour faire partie d’un groupe s’apprêtant à répondre à un appel d’offres lancé par l’Union européenne (plus précisément, le Service européen d’action extérieure), l’UE souhaitant – après plusieurs d’années d’absence – s’implanter à Mogadiscio, en Somalie ».
Avec pour objectif de construire près de l’aéroport de Mogadiscio (sur un terrain gracieusement offert par les autorités somaliennes) un immense « compound » hautement sécurisé pour y protéger tous les fonctionnaires et militaires des Nations Unies en poste dans la capitale somalienne.

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« On a construit dans son dos
un véritable pacte de corruption »

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« Ce qui a été stupéfiant dans cette affaire, c’est que tout se passait bien, poursuit-il. Politiquement comme commercialement, si l’on peut employer ce terme, tout devait bien se passer jusqu’au moment où Abshir Aden Ferro a assisté à son corps défendant à l’organisation d’un pacte de corruption. Les partenaires, qui l’ont amené à ce projet là, ont en effet construit dans son dos un véritable pacte de corruption. Et dès le moment où il en a eu connaissance, il s’est aussitôt désolidarisé de ce groupement, humainement et moralement ».

Avant d’ajouter à titre personnel : « C’est ce qui m’a séduit dans sa personnalité parce que l’on pourrait considérer qu’on a plus d’argent à se faire en participant à un groupement qui monte une opération de corruption qu’à s’en éloigner. Seul, Abshir Aden Ferro a donc pris cette décision importante pour lui, pour ce qu’il représente et pour ceux qu’il souhaite représenter plus tard ».
Issu d’une grande famille somalienne, mais résidant à Londres – où il est très actif au sein de l’importante diaspora – Abshir Aden Ferro ne cache pas son ambition d’être candidat aux prochaines élections présidentielles dans son pays, en 2026.

Quand Abshir Aden Ferro se retire de cette opération qui sent mauvais et pourrait bien le compromettre, nous sommes alors à la veille de Noël 2015. Vont s’en suivre plus de sept ans de procédures judiciaires, qu’il serait bien trop long et fastidieux de vouloir résumer ici, « pour faire reconnaître qu’il y avait une déloyauté contractuelle de la part de nos partenaires au sein de ce consortium ». Ses conseils saisissent alors les juridictions compétentes et les institutions européennes par le biais de l’OLAF (Organisme européen de lutte anti-fraude) dont les investigations sont tenues secrètes.

« Malgré toutes ces actions et des articles de presse dans Paris Match ou Le Monde Afrique, il y a eu une volonté de l’institution de cacher cette affaire », observe encore Me Argenton qui s’indigne de la réponse écrite de l’avocat de la partie adverse lui répondant tout de go : « Vous n’avez pas à interférer dans cette affaire. Cela ne vous regarde pas ! ». Aveu manifeste que certaines institutions européennes ont encore visiblement bien des choses à cacher !
Et de conclure, avant de passer la parole à son confrère pénaliste : « Quand on a eu vent de ce qui se passe aujourd’hui au sein de l’Union européenne, on s’est dit qu’Abshir Aden Ferro avait été il y a quelques années un des premiers lanceurs d’alerte sur cette façon de faire, sur ces curieux dysfonctionnements ».

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Un appel d’offres de l’Union européenne
de plus de 110 millions de dollars »

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D’où les informations supplémentaires données dans la foulée par Me Etienne Arnaud comme pour un complément d’enquête. « On parle d’un appel d’offres de l’Union européenne à plus de 98 millions d’euros, soit 110 millions de dollars, ce qui est énorme, rappelle-t-il. Et le consortium qui l’obtient, la société Losberger pour ne pas la citer, l’aurait obtenu manifestement à la faveur de ce que l’on pense être un pacte de corruption ».

« Il y a dans ce dossier un enregistrement où l’on entend très clairement les personnes du consortium évoquer le fait que, pour avoir obtenu ce contrat, il va falloir remercier les gens, c’est-à-dire donner un pourcentage (entre 2 % et 3 %) du montant total du contrat. On est donc dans une situation où il y a manifestement eu des contreparties promises et certainement par derrière versées. C’est ça que M. Abshir Aden Ferro dénonce depuis le début, c’est-à-dire dès avril 2016 où une plainte va être déposée au Parquet national financier (PNF), une institution créée au lendemain de l’affaire Cahuzac. Le PNF s’en est saisi immédiatement et a ouvert une enquête préliminaire toujours en cours ».

Et Me Arnaud de conclure à son tour : « C’était, à l’époque, un peu crier dans le désert. Et l’intérêt du Qatargate, actuellement, c’est que l’on voit que, dès 2016 manifestement, le même genre de pratiques avaient lieu, qu’à l’époque le PNF s’y intéressait et qu’il s’y intéresse toujours et que manifestement ce n’est pas un cas isolé ».

Avant de déplorer toutefois que « l’Europe soit une machine qui s’autocontrôle, mais n’ait pas de contrôle externe pour parler comme les juristes, la base d’un contrôle qui soit correctement fait étant que ceux qui contrôlent n’aient pas les mêmes intérêts que les personnes ou sociétés contrôlées ».

Mais le PNF a dû tout d’abord attendre que l’OLAF lui transmette les éléments avant de lancer des perquisitions en 2019 dans plusieurs sociétés faisant partie de ce consortium et d’y saisir un certain nombre de documents. Ce qui a permis de retrouver les circuits financiers de cette corruption organisée et qui donnera lieu à un jugement dans les mois qui viennent car « ce dossier est sur le point d’être clôturé »
« M. Abshir Aden Ferro a révélé les faits », ajoute-t-il en soulignant que restera encore la question de l’éventuelle corruption d’agents publics européens : c’est l’enquête qui le déterminera ».

Quelles seront les prochaines étapes de cet épineux et sulfureux dossier ?

Partie de Paris, l’action juridique lancée il y a plusieurs années se délocalise désormais à Bruxelles, où un juge d’instruction belge va être prochainement saisi pour tenter de venir à bout de ce dossier et des « soupçons de corruption ». Ce qui permettra aux conseils d’Abshir Aden Ferro d’avoir enfin accès à toutes les pièces du dossier.

L’étape suivante, précise Me Argenton, « sera d’écrire à M Josep Borrell, Vice-Président de la Commission européenne, pour le sensibiliser à cette affaire qui, de manière très étonnante, n’a pas attiré jusqu’à aujourd’hui l’attention des institutions européennes ».
Car le « Somaliegate » fut à l’évidence jusqu’à présent bien étouffé ! Il est vrai qu’il n’y eut pas de Mondial de foot à Mogadiscio pour faire caisse de résonance.

(*) « Ma Vie pour la Somalie » édité par AfricaPresse.Paris dans la collection « Leaders d’Afrique » (208 pages – 18 €)

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DERNIER JOUR CE LUNDI 13/02 POUR S’INSCRURE
à la VIIe Conférence des Ambassadeurs Africains de Paris :
« Bénin, Maurice, Sénégal : les nouvelles ambitions
du tourisme africain »

Trois Ambassadeurs d’Afrique et deux experts constituent le panel de la VIIe Conférence mensuelle des Ambassadeurs Africains de Paris, la CMAAP 7, organisée par Africapresse.Paris et le CAPP (Club Afrique de la Presse parisienne) autour du thème : « Bénin, Maurice, Sénégal : les nouvelles ambitions du tourisme africain ».

Le tourisme est un formidable pourvoyeur d’emplois et de devises, et certains pays africains en font un axe prioritaire de leur stratégie de développement. Ils s’efforcent de se distinguer en proposant des offres nouvelles, comme le Bénin avec le tourisme mémoriel, le Sénégal de la Téranga, ou encore Maurice, l’Île où se célèbre la rencontre de trois continents.

En format hybride, la CMAAP 7 sera transmise en direct sur Youtube, à partir de 17 h, le mercredi 15 février 2023, tandis que sa tenue en présentiel se déroulera àl’Hôtel de l’Industrie, 4 place Saint-Germain-des-Prés, 75006 Paris.

ACCUEIL dès 16 h 15, conférence de 17 h à 19 h.

Un cocktail-champagne de réseautage prolongera la rencontre,
jusqu’à 20 h.

L’accès à la conférence et au cocktail est strictement réservé aux personnes dont les organisateurs auront validé l’inscription.

LES PERSONNALITÉS DU PANEL :

- S.E. M. Vijayen VALAYDON, Ambassadeur de MAURICE,
Président du Groupe des Ambassadeurs francophones de Paris

- S.E. M. Eusèbe AGBANGLA, Ambassadeur du BÉNIN

- S.E. M. El Hadji MAGATTE SEYE, Ambassadeur du SÉNÉGAL

- M. Abdou DIOP, Directeur général mazars Maroc

 Un(e) Représentant(e) de PROPARCO

- M. Alfred MIGNOT, Directeur AfricaPresse.Paris, organisateur et modérateur des CMAAP.

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