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La relocalisation coûteuse et ratée de la fonderie Loiselet, une mésaventure illustrative des limites du « made in France »

4 février 2021
La relocalisation coûteuse et ratée de la fonderie Loiselet, une mésaventure illustrative des limites du « made in France »
En 1996, la fonderie Loiselet, située à Dreux, est fermée et délocalisée en Pologne, suivie d’une liquidation judiciaire en 2001 et une délocalisation vers la Chine en 2003. En 2013, la fonderie Loiselet ferme son usine chinoise et rapatrie sa production en France, soutenue par les pouvoirs publics. Mais cette relocalisation va virer au chemin de croix…

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Une contribution de Jean-Louis GUIGOU
Fondateur de l’IPEMED

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Le coût de cette première relocalisation aidée par l’État aurait dépassé les 20 millions d’euros, dont un emprunt d’État à 0 % de plus de 6,5 millions d’euros sur les 12,4 millions d’investissement initial, en addition au soutien de Dreux Agglomération.

L’entreprise finalise donc sa relocalisation à Dreux. Cet investissement de 12,4 millions d’Euros, Sylvain Loiselet l’explique car « Les coûts de transport sont énormes : 960 000 euros par an. Nous allons lancer sur Dreux une production très automatisée qui va générer un fort gain de compétitivité. Nous aurons plus de volume avec des clients plus proches de la production. C’est pour tout cela que c’est encore plus intéressant d’être en France ».

Relocalisation qui avait permis de faire renaître l’industrie lourde dans une friche de Dreux et de recréer 103 emplois. L’ancien ministre du Redressement productif, Arnaud Montebourg, a soutenu la démarche en visitant le site en juillet 2013. Mais, les investissements massifs ont plombé la trésorerie. Le passif atteignait 19 millions d’euros, dont 4 millions de dettes fournisseurs. Ainsi, en décembre 2013, six mois seulement après la visite ministérielle, la fonderie exemplaire faisait faillite.

Placée en redressement judiciaire au début de 2014 par le tribunal de commerce de Chartres, la fonderie Loiselet a finalement été reprise par un investisseur franco-algérien, Khelfaoui Boubeker, en juin 2014. Les 83 salariés encore dans l’entreprise ont été conservés. Cet homme d’affaires a notamment des participations dans SGH, une société qui possède des résidences hôtelières en Île-de-France.
Durant l’automne, le nouveau Président ferme l’établissement secondaire de Nogent-le-Roi (Eure-et-Loir) et augmente le capital qui atteint désormais 2,4 millions d’euros.

La leçon de l’échec de la reprise

Selon L’Écho Républicain, l’homme d’affaires franco-algérien Khelfaoui Boubekeur n’a pu injecter qu’un million d’euros. Il en fallait trois supplémentaires pour terminer les investissements en cours. Et les banques n’ont pas suivi, explique-t-il en substance au quotidien régional.

Le 27 août 2015, le tribunal de Chartres a prononcé sa liquidation judiciaire. Et les 65 salariés ont donc été licenciés. Le matériel de la fonderie Loiselet-Fondiel est vendu aux enchères en avril 2016.
L’homme d’affaires franco-algérien a répondu comme suit à l’Écho Républicain, en avril 2016 :

— « Que pensez-vous de l’expérience des relocalisations ?

— Tous les économistes reconnus en France et à l’étranger sont unanimes sur les erreurs commises en matière de relocalisation. Pour une raison simple de compétitivité, la relocalisation des industries en Europe n’était pas, généralement, viable à cause des prix des produits finis à l’international.
En revanche, la France aurait mieux fait de relocaliser dans les pays d’Afrique du nord pour réduire les coûts du transport maritime des marchandises rapatriées de la Chine et d’Asie du sud-est. En outre, la coopération économique entre la France et les pays du Maghreb aurait eu un sens plus concret. »

Pendant un an, je me suis efforcé à faire comprendre au cabinet du ministre et au ministre lui-même l’intérêt de relocaliser cette entreprise, forte consommatrice d’énergie, en Algérie. La coproduction aurait permis de créer des emplois en Algérie et en France (R&D, assemblage, commercialisation).

Cette mésaventure française vient à propos illustrer ce que démontre l’économiste Patrick Artus, les délocalisations de Chine ne vont pas bénéficier aux pays OCDE, mais à leurs pays voisins : le Mexique, la Colombie pour les États-Unis ; les pays du sud-est asiatique pour la Chine ; la Turquie, les PECO et le Nord de l’Afrique du Maroc à l’Égypte pour l’Europe.
……

Billet issu de la série « Humeurs Méditerranéennes » (n° 187), par Jean-Louis Guigou.
Première édition le vendredi 30 septembre 2016, sur le site Ipemed.coop. Republié avec l’aimable autorisation de l’autur.

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