Retrouvez AfricaPresse.paris sur :
RSS

Outils

Jacques-Jean Sarraf

- J.-J. Sarraf, Président de BusinessMed : « La Méditerranée émergente »

Tous pays EUROMED-AFRIQUE | 8 août 2008
- J.-J. Sarraf, Président de BusinessMed : « La Méditerranée émergente »
Marseille - « Nous autres, pays du Sud de la Méditerranée, nous devrions être convaincus que nous ne connaîtrions de véritable progrès que le jour où nous pourrions évoluer dans le cadre d’un vrai marché commun. Et nous ne pourrons aspirer à une globalisation efficace, qu’après avoir accompli une intégration économique complète à l’Europe. »
Jacques-Jean SERRAF, Président de BusinessMed, en compagnie d’autres responsables d’organisations d’entrepreneurs, lors des Med Business Days de Marseille, les 3- juillet 2008.

Allocution prononcée par Jacques-jean SERRAF lors des « Med Business Days » - 3° Journées de la Compétitivité - Marseille, 3 juillet 2008

La rencontre des hommes d’affaires est certainement un événement important. Les avis partagés peuvent grandement influencer la politique économique de nos pays. La politique ne peut nous ignorer que dans deux cas de figure :
Quand nous adoptons des positions divergentes et irréductibles ;
Quand nous négligeons une dimension fondamentale de la vie nationale, le social ou l’environnement.
Autant dire que nous ne devons pas négliger l’occasion de nous comprendre et de nous entendre. C’est pour nous l’occasion d’exprimer des intérêts communs ; mais c’est surtout l’opportunité de penser ensemble l’avenir. L’avenir de nos entreprises ; l’avenir de nos pays, qui en dépendent ; l’avenir de notre Région dont nous dépendons tous de plus en plus.
Nous autres, pays du Sud de la Méditerranée, nous devrions être convaincus que nous ne connaîtrions de véritable progrès que le jour où nous pourrions évoluer dans le cadre d’un vrai marché commun. Et nous ne pourrons aspirer à une globalisation efficace, qu’après avoir accompli une intégration économique complète à l’Europe.

Des conditions favorables à l’investissement

Il est incontestable que la technologie du Nord, les coûts avantageux du Sud et les flux financiers du Golfe créent une combinaison de facteurs idéale, dont les investisseurs ne profitent pas assez. Cependant une situation exceptionnelle est née de la plus-value de l’euro par rapport au dollar, auquel la plupart des monnaies du Sud sont indexées.
Les pays du Sud, dont le partenaire principal est l’Union Européenne, ont vu leurs actifs en euro réduits du tiers. Pour l’investisseur c’est une opportunité qui ne se renouvellera pas. Pour les pays du Sud, c’est un prix raisonnable à payer pour l’acquisition de la technologie et la pénétration des marchés.
En ce moment la conjoncture est particulièrement favorable, La plupart des pays de la Région connaissent une croissance remarquable. La croissance moyenne des pays méditerranéens dépasse les 7 % (cf. Sectoral ENP, avril 2008). On peut croire que la Région est désormais une région émergente. Ceci revêt une importance capitale pour l’investissement. Dans les conditions d’ouverture du marché que nous allons de plus en plus expérimenter, les projets s’adressent systématiquement à un ensemble de pays susceptibles de devenir de marché unique, s’ils ne le sont déjà.

L’Edification des ensembles économiques

L’UPM doit assurer en premier la cohérence économique de la Région. Cette cohérence nécessite l’avènement d’un marché commun méditerranéen. Toute autre formule est insuffisante. Le commerce entre les pays du Sud atteint difficilement le chiffre de 5 % de leur commerce extérieur.
Les importations de la Région représentent 4,5 % du total, et les exportations vers la Région 6,2 % (Commerce extérieur – 70/2007 – Aline Bouzergan). Cela est évidemment insuffisant à constituer un marché. Des accords de libre échange seraient toujours d’une efficacité très limitée. Le GAFTA en place depuis déjà dix ans et qui depuis le début de 2005 connaît une application intégrale, n’a pas donné de meilleurs résultats. Huit pays méditerranéens sont parmi les signataires du GAFTA.

Le grand espoir vient de l’accord d’Agadir qui lie le Maroc, la Tunisie, l’Egypte et la Jordanie. Il faut espérer qu’il s’étende rapidement à l’ensemble des pays du Sud. Il faut espérer surtout qu’il puisse fonctionner comme un véritable marché commun, et qu’il couvre l’ensemble des produits et services. Il faut que l’application du marché commun corresponde sur le plan régional en tout point à la pratique commerciale dans le cadre national. La Communauté du Charbon et de l’Acier, le Marché commun des six puis des dix jusqu’à nos jours en sont la meilleure illustration.

Les facteurs d’intégration des pays du Sud

A quelques exceptions près, les pays du Sud ont réussi au cours des dernières années :
A limiter l’inflation à des taux acceptables (Maroc 3,3 % - Tunisie 4,5 % - Egypte 4,1 % - Liban 5,6 % - Jordanie 6,3 % - Territoires Palestiniens 3,3 %) [1] malgré la baisse du billet vert ;
à équilibrer leur budget ;

 à maintenir une dette extérieure très réduite : la moyenne tourne autour de 18,5 % (Algérie 9,21 % - Tunisie 24,6 % - Maroc 11,35 % - Egypte 8,55 % - Syrie 14 % - Jordanie 32 % - Turquie 29,29 %) ;
à maintenir une monnaie solide (indexée au dollar ou à un panier de devises, et stable depuis des années) ;

 à connaître une croissance appréciable ( 4 - Algérie 6 % - Tunisie 5,5 % - Maroc 8 % - Egypte 6,8 % - Liban 4 % - Jordanie 6,4 % - Turquie 5,1 % .
Ceci ne s’est pas réalisé sans une discipline méritoire et l’assistance de l’Union Européenne.
Nous sommes en droit d’espérer une accélération des privatisations, la réduction et un jour prochain l’élimination des protections, et la généralisation de l’économie sociale de marché sur le modèle européen le plus avancé.

Pour une politique favorable au développement

Sans vouloir rentrer dans une querelle d’école, nous pouvons dire d’expérience que « les ajustements structurels » ont retardé le décollement de la Région. D’ailleurs la Banque Mondiale semble les avoir définitivement écartés.
Afin de développer une politique favorable au développement, sept axes d’action me paraissent décisifs :

1 - Le premier levier de la croissance est une politique favorable à l’emploi. Nous saluons les efforts de l’Union Européenne en faveur de l’investissement et de l’emploi dans les pays du Sud ;
2 - Parallèlement la stabilité des prix dans la Région permet de plus en plus des politiques monétaires favorables au développement ;
3 - La croissance du PIB dans une perspective de réduction du poids de l’Etat nécessite une croissance plus que proportionnelle de la Production Nationale (des biens et services) et ceci implique forcément l’équilibre de la balance courante  ;
4 - La pression fiscale doit retrouver un niveau conséquent avec le rôle de l’Etat dans une économie sociale de marché ; et maintenir une stricte stabilité fiscale  ;
5 - La réalisation ou la divergence de l’objectif « emploi » doit orienter les politiques monétaire et fiscale  ;
6 - La promotion du travail est le meilleur moyen d’assurer les objectifs de développement du millénaire, auxquels tous les états du Sud se sont engagés ;
7 - Enfin le PIB et la croissance doivent être calculés en tenant compte du résultat environnemental, car il ne saurait y avoir de véritable développement sans la sauvegarde de l’environnement.

L’intégration économique Nord - Sud

Le Processus de Barcelone a certes plus de mérite qu’on ne lui attribue souvent. Il nous a donné conscience du poids que représente la zone Euro-Méditerrannéenne dans la compétition internationale. De l’efficacité de cet ensemble dépend notre progrès à tous.
Nous avons le choix de l’accélérer.
La croissance des échanges entre les pays du Sud, et surtout les progrès réalisés dans la voie d’un marché commun, constituent attraction irrésistible à l’investissement.
L’intégration de l’économie Nord – Sud ne peut être que le fruit de cet investissement.

Jacques-Jean SARRAF
Président de BusinessMed -
Union Méditerranéenne des Confédérations d’Entreprises
Marseille, le 3 juillet 2008

Articles récents recommandés