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Jawad KERDOUDI, président de l’IMRI : « De grands défis à affronter pour la Zone de libre-échange continentale africaine »

5 juin 2019
Jawad KERDOUDI, président de l'IMRI : « De grands défis à affronter pour la Zone de libre-échange continentale africaine »
Entrée en vigueur le 30 mai 2019, la ZLEC doit aboutir à terme à un marché unique continental de biens et de services, et à la création d’une union douanière et monétaire. Mais pour y parvenir, les pays membres devront aussi bien développer leurs capacités productives et leurs infrastructures, que fournir une aide financière et technique aux pays africains les moins avancés.



Une tribune libre de Jawad KERDOUDI
Président de l’IMRI

Institut Marocain des Relations Internationales


La ZLEC est un grand projet de zone de libre-échange qui doit regrouper tous les États de l’Union africaine. Elle sera composée des communautés économiques régionales existantes, à savoir la COMESA (Afrique Orientale et Australe), la CAE (Afrique de l’Est), la SADC (Afrique Australe), la CEEA (Afrique Centrale), la CEDEAO (Afrique de l’Ouest), l’UMA (Maghreb) et la CENSAD (États Sahélo-Sahariens). Le projet a été lancé en 2012 et le processus de négociations en 2015. Trois forums ont été consacrés à la ZLEC en 2016, et le 21 mars 2018 à Kigali 44 pays sont signataires du document. D’autre pays n’ont pas rejoint le projet tels que le Nigéria, le Burundi, l’Erythrée, la Namibie et la Sierra Leone. Pour que la ZLEC puisse être mise en œuvre, il fallait la ratification de 22 États, ce qui a été réalisé par la Guinée le 29 avril 2019, et a ouvert la mise en vigueur à partir du 30 mai 2019.

L’objectif de la ZLEC est de favoriser la croissance économique et de promouvoir l’industrialisation et le développement durable. Les moyens à utiliser sont la suppression des droits de douane et des obstacles non tarifaires, la libre circulation des personnes et des investissements, afin d’aboutir à terme à un marché unique continental de biens et de services, et à la création d’une union douanière et monétaire.

Ces mesures permettront de développer le commerce inter-africain qui n’est actuellement que de 16 %. Elle permettront également d’améliorer la compétitivité de l’entreprise africaine qui pourra produire à grande échelle, accéder au marché continental, et bénéficier d’une meilleure redistribution des ressources. La ZLEC permettra également de mieux utiliser les complémentarités entre pays africains, et d’exploiter collectivement le réservoir des terres et des richesses naturelles.

Un marché de 1,2 milliard de consommateurs

Elle facilitera également une meilleure harmonisation et coordination des régimes de libération entre les communautés économiques régionales, et relèvera le défi des adhésions multiples et du chevauchement. Enfin la ZLEC permettra à l’avenir de négocier d’une seule voix les accords commerciaux sur le plan international, notamment avec l’Union européenne où les accords de Cotonou arriveront à échéance en 2020 et ceux de l’AGOA avec les États-Unis en 2025.

On ne peut que se féliciter de l’entrée en vigueur de la ZLEC sur un marché de 1,2 milliard de consommateurs avec un PIB de 2 500 milliards de dollars. Cependant cette nouvelle étape n’est pas un aboutissement, car le processus d’application sera très long vu les grands obstacles à affronter. A l’heure actuelle, seuls 52 États ont signé et 24 ont ratifié le document. Il faut pousser les retardataires à signer et ratifier, notamment le Nigéria qui est un poids lourd de l’Afrique sur le plan économique. La ZLEC fait partie de l’Agenda 2063 pour l’Afrique, les experts ont fixé à 2028 la création du marché commun africain et de l’Union douanière. L’Union monétaire prendra certainement plus de temps, étant donné les grandes difficultés pour la création d’une monnaie unique africaine.

Niveau de développement inégal

L’Afrique ne représente actuellement que 5 % du commerce mondial. Pour augmenter le commerce extérieur de l’Afrique, il y a lieu de multiplier les capacités productives, notamment par la transformation sur place des matières premières, qui est la première étape pour l’industrialisation du continent. Il y a lieu également de développer fortement les infrastructures notamment les ports et les aéroports, ainsi que les réseaux d’information commerciale.

Il faut faciliter l’accès au financement des entreprises africaines exportatrices, et éliminer tous les obstacles aux échanges de commerce des biens et des services. La création d’une zone franche continentale ne bénéficiera pas également à tous les pays africains étant donné leur niveau de développement inégal. Étant donné la perte de recettes douanières pour les pays africains les moins avancés, il y a lieu de leur trouver des mécanismes de compensation financière, ainsi qu’une coopération technique pour accélérer leur développement.

Un « rendez-vous historique », selon le Roi Mohammed VI

Parallèlement à la construction de la ZLEC, les communautés économiques régionales existantes doivent accélérer leur intégration économique, ce qui facilitera parachèvement de la zone franche continentale. Le Maroc est favorable à la ZLEC comme l’atteste le discours du Roi Mohammed VI au Sommet extraordinaire de l’Union africaine sur la ZLEC qui s’est tenu en mars 2018 à Kigali. Il a qualifié la création de la ZLEC de « rendez-vous historique » et « d’acte majeur de notre volonté commune de construire l’Afrique de demain ». La création de la ZLEC permettra au Maroc de développer ses exportations et ses investissements en dehors de l’Afrique de l’Ouest.

En conclusion, l’entrée en vigueur de la ZLECenclenche une dynamique positive pour le continent africain. Il faut maintenant que l’Union africaine et les pays membres s’attellent à la tâche pour sa concrétisation. L’expérience à montré que la création de zones de libre échange est un moyen et non une fin pour le développement, et qu’elle bénéfice généralement aux pays les plus développés. Aussi, la priorité pour l’Afrique doit être le développement des capacités productives et des infrastructures, ainsi que l’aide financière et technique aux pays africains les moins avancés.

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