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Investissements d’impact en Afrique et Méditerranée - Philippe Kunter (Bpifrance) : « Dans les entreprises, les salariés bougent et c’est important car ce sont eux qui font bouger les choses »

26 novembre 2019
Investissements d'impact en Afrique et Méditerranée - Philippe Kunter (Bpifrance) : « Dans les entreprises, les salariés bougent et c'est important car ce sont eux qui font bouger les choses »
Coordination pour l’Afrique de demain (CADE) a rassemblé experts, financeurs et dirigeants d’entreprise autour de plusieurs tables-rondes sur le thème des investissements d’impact en Afrique et en Méditerranée. Un concept d’actualité qui interroge sur la nouvelle manière d’investir dans un continent en mutation. Premiers éléments de réponse avec cette grande rencontre économique, le 15 novembre à Paris.

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Carmen Olga Féviliyé, AfricaPresse.Paris
@FeeFeviliye | @PresseAfrica

Le constat des experts est unanime : en Afrique, il y a une surabondance de liquidités qui ne sont pas distribuées, en raison de taux de crédit élevés et d’un faible taux de projets dits « bancables » dans le jargon financier. Circonstance aggravante, les banques africaines préfèrent les crédits aux projets liés à la commande publique, au détriment du secteur privé… Alors comment mobiliser des capitaux et sur quels secteurs porteurs, afin de pousser les « investissements d’impact » (impact investing en anglais) ? C’est sur ce thème que Roland Portella, président de la CADE (Coordination pour l’Afrique de demain), a organisé plusieurs tables-rondes vendredi 15 novembre à Paris.

Associer la philanthropie et la finance

Mais tout d’abord, c’est quoi des « investissements d’impact » ? Selon le Global Impact Investing Network (GIIN), ce sont les investissements effectués dans des entreprises, organisations et fonds, avec l’intention de générer, en plus du rendement financier (en général inférieur ou égal au taux du marché), un impact social et environnemental positif. Ils associent la philanthropie et la finance. Depuis quelques années, ils ont connu une croissance exponentielle.
Par exemple, afin de promouvoir la mobilisation des investissements à impact positif, la Banque mondiale (BM) a fait de ces investissements une référence, une nouvelle manière d’investir sur la nature de l’activité qui doit créer une valeur sociale positive. La BM compte 500 milliards d’actifs dans cette nouvelle catégorie qui permet d’attirer les investisseurs désireux de tendre vers la réalisation des ODD, autrement dit des « objectifs de développement durable » à l’horizon 2030 (il en existe 17), définis par l’ONU pour assurer la paix et la prospérité pour les peuples et la planète.

Limite au profit

Désormais, « il appartient aux entreprises de poser des actions concrètes avec un comportement plus responsable, respectant les droits fondamentaux, avec une limite au profit  », a estimé Stéphan Brabant, lors de la table-ronde de la CADE. Pour cet avocat, associé-gérant du cabinet Herbet Smith Freehills, aujourd’hui, « les entreprises commencent à prendre conscience et à changer leurs pratiques. La France est le seul pays au monde à avoir incorporé ces principes dans les lois en direction des entreprises. Ces lois exigent de prendre des dispositions respectant les droits fondamentaux dans la pratique des activités. Les entreprises ont une prise de conscience forte quant au respect des droits fondamentaux notamment en Afrique, en Chine ».

Les Enjeux de Demain

Certes, mais comment aller plus loin et établir une passerelle efficace entre les investissements d’impact et les ODD tout en intéressant davantage les entreprises à la question ? Selon Philippe Kunter, directeur du Développement durable et RSE de Bpifrance, son établissement a tenté de donner une réponse concrète aux ODD dans une étude sur « Les Enjeux de Demain » où sont recensées les solutions techniques à développer par les entrepreneurs ainsi que les solutions concrètes pour la collectivité. « Nous avons accompli notre part dans la réalisation de cet objectif qui est d’investir de manière durable en Afrique, a affirmé Philippe Kunter. Notre rôle est de financer, d’investir et d’accompagner. Toutefois une entreprise doit être rentable. On observe malgré tout que les choses changent. La RSE relève du volontariat et doit être réglementé selon les entreprises. Les choses bougent, les patrons d’entreprises bougent, surtout les salariés bougent, et c’est important car ce sont eux qui font bouger les choses ».

Mobiliser le capital africain

« Il est important que le capital africain soit mobilisé et il y a du capital sur le continent avec un fort potentiel », a estimé pour sa part David Munnich, le directeur des Opérations chez Investisseurs & Partenaires : « Nous avons investi notamment au Sénégal et au Cameroun avec une majorité de capital et de compétences en ressources humaines africains ». « Nous apportons des capitaux aux entreprises africaines en capital-investissement, a-t-il précisé, pour un rendement financier en vue de la création d’emplois dans des secteurs porteurs comme l’agrobusiness, la santé, l’éducation, etc. Actuellement, nous réfléchissons à lancer un fonds dédié à l’éducation ». Pour mobiliser les ressources de la diaspora, cet investisseur d’impact a pour partenaire le Club Efficience.

Finance durable

Pour sa part, Sonia Essobmadje, Responsable conseil Investissement d’Impact Positif à la Société générale, a expliqué qu’il est nécessaire de « trouver de nouvelles solutions de financements », car « avec les nouvelles technologies, de nouveaux acteurs arrivent sur les nouveaux secteurs de financement. En outre, un seul service peut avoir plusieurs impacts, c’est un modèle vers lequel nous allons ».
Et, puisque « la finance durable à impact positif consiste à financer les transactions qui ont un impact positif sur l’environnement social et économique en s’assurant en amont que l’impact négatif a été géré », il ne faut pas oublier de redéfinir un nouveau type de Partenariats publics-privés (PPP).
Karim Zine-Eddine, directeur des études chez Paris Europlace et Africafinlab, a montré qu’en Afrique et en Méditerranée, la finance intègre dorénavant la variable impact investing. Pour lui, il faut 3,5 milliards en Afrique. Pour bénéficier de cette « manne », l’infrastructure à créer doit être « durable » et susciter des emplois.

Trois exemples d’investissement d’impact

Avec la dernière table-ronde consacrée aux « Secteurs porteurs, entreprises et initiatives créatrices d’impact social et environnemental », les intervenants sont entrés dans le concret. Ainsi, Eden d’Almeida, directeur général d’Africa global recycling, président du club RSE Togo et fondateur de l’école Eco-mécénat, a expliqué comment il pris à bras-le-corps la problématique du déchet encore très mal gérée en Afrique. « Il existe, a-t-il noté, une problématique sur le déchet qui n’est pas résolue alors que son exploitation représente une manne pour le continent. A travers les déchets, nous touchons toutes les composantes de l’investissement d’impact », via " la mise en place du tri sélectif en Afrique ».

La valorisation du déchet dans les écoles

A travers son initiative Moi Jeu Tri, Eden d’Almeida éduque à la valorisation du déchet dans les écoles, avec comme acteurs des enfants-ambassadeurs du tri-sélectif, démontrant que le déchet a de la valeur en argent. L’impact sur le social intervient avec l’utilisation de l’argent récolté : financement des outils informatiques, paiement des frais scolaires dans plusieurs villes et créations d’emplois.

Création d’entreprise et sécurité routière

De son côté, Aziz Senni, directeur général de C’Montaxi !, co-président de la commission «  Nouvelles responsabilités entrepreneuriales » du Medef, s’active notamment au Sénégal dans le domaine de la mobilité. Son investissement impactant a généré des emplois dans le domaine des transports en commun : des entrepreneurs chauffeurs de taxi qui créent leur propre entreprise, avec notamment une formation à la sécurité routière. Enjeu : faire en sorte que 70 % des chauffeurs de taxis au Sénégal soient propriétaires de leur véhicule. C’Montaxi ! accorde une aide à l’accession à la propriété, avec un accompagnement dans le développement des applications.

Solidaire et responsable

Quant à Bruno Ralay-Ranaivo, le président d’Oikocredit IFO investit de manière solidaire et responsable à travers sa coopérative dans des projets dans les économies émergentes tout en protégeant l’environnement, avec un portefeuille de 1,2 million d’euros et 57 000 investisseurs comme partenaires. Avec ses micro-crédits, cette coopérative internationale d’impact est présente dans 70 pays afin d’apporter un financement aux personnes à faible revenu et exclues du circuit bancaire. Avec des projets dans le solaire ou la cuisson propre, 72 000 ménages et 13 000 entreprises ont bénéficié de son accompagnement.

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