#ForumAfrique2020 – L’Union européenne encourage le secteur privé africain à s’intéresser de près aux perspectives offertes par la ZLECA
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Jean-Louis Alcaide, AfricaPresse.Paris
@jlalcaide1 | @PresseAfrica
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Annoncé en 2017 par Jean-Claude Juncker, alors président de la Commission européenne, le Plan d’investissement extérieur de l’UE est une des composantes de l’Alliance entre l’Europe et l’Afrique proposée par la Commission européenne en 2018. Une Alliance avalisée lors du conseil des ministres des Affaires extérieures UE-UA de janvier 2019. "C’est une Alliance pour la création d’emplois et l’investissement. Elle comporte trois priorités : l’investissement, la formation des jeunes Africains, notamment des jeunes entrepreneurs, et la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECA)", souligne Axel Pougin de la Maisonneuve, Chef d’Unité adjoint à la Direction Générale du Développement et de la Coopération Internationale (DEVCO) de la Commission européenne, qui participait au Forum Afrique 2020 organisé vendredi 7 février à Paris par le MOCI et le CIAN.
Mixage de fonds publics-privés
Instrument de cette politique européenne, le PIE décline trois volets fondamentaux. Le premier, c’est le financement des investissements en général, par exemple dans les infrastructures par le mixage des fonds publics-privés, mais aussi l’investissement des PME africaines ou des PME des pays du Maghreb ou du Voisinage Est, par la mise à disposition de garanties auprès d’Institutions de Développement Internationales et d’intermédiaires financiers comme les banques locales ou les institutions de microcrédit. Grâce à ces garanties, adossées au budget de l’Union européenne, les intermédiaires financiers peuvent prendre davantage de risques qu’ils n’en prennent jusqu’à présent.
Faciliter le dialogue et son efficacité
Le deuxième volet, c’est une assistance technique vis-à-vis de ces acteurs financiers intermédiaires car prêter à des PME c’est un métier qu’il faut apprendre si cela n’est pas le vôtre. Dans ce domaine, il y a un besoin de renforcement des capacités des banques locales, au Burkina, au Burundi, etc. et même dans des pays comme le Nigeria.
Quant au troisième volet, c’est l’amélioration du climat d’investissement et du climat des affaires dans les pays africains en particulier. C’est sur des deux aspects que se focalise le dialogue politique entre l’UE et les gouvernements africains, afin d’y associer systématiquement le secteur privé. Ce dernier est en effet réputé mieux savoir que quiconque quels sont les obstacles rencontrés pour commercer, investir et croître. La Commission accompagne ce dialogue par des projets. Exemple : quand un obstacle à l’investissement a été clairement identifié ou qu’il est décidé de développer une chaîne de valeur dans tel ou tel secteur, l’Union européenne peut faciliter le dialogue et son efficacité en apportant un financement qui permette de matérialiser les solutions.
Création de 10 millions d’emplois
En présentant le PIE, le président Juncker avait évoqué la création de 10 millions d’emplois en Afrique, voire davantage à moyen terme. Il est toutefois trop tôt pour en faire un bilan, puisque ce Plan d’investissement extérieur est encore en train de se mettre en place. « Les garanties ont des objectifs de création d’emplois chiffrées et sont au début de leur mise en œuvre, explique Axel Pougin de la Maisonneuve. Par exemple, l’une d’elles, mise en œuvre par l’institution financière de développement néerlandaise FMO, intitulée NASIRA, vise à la création de 800.000 emplois en soutenant l’entrepreneuriat au sein des populations de réfugiés, des femmes et des jeunes ».
Le PIE comprend également des projets d’infrastructures, notamment énergétiques, basées sur le mixage de fonds publics-privés. L’UE contribue aussi à la Facilité pour l’Inclusion Énergétique, gérée par la BAD, avec pour objectif de financer 40 MW de capacité électrique et permettra de créer 1 000 emplois directs, en plus des emplois indirects rendus possibles par la génération d’électricité supplémentaire. « Pour l’UE, estime le Chef d’Unité adjoint, le succès de nos programmes et de l’Alliance se mesurera à l’aune de la création d’emplois. Il s’agit d’emplois directs mais aussi indirects, ces derniers demandant plus de temps pour les dénombrer ».
4,1 milliards d’euros mobilisés
Alors que l’Union européenne avait promis 4,1 milliards d’euros qui devaient se traduire par 44 milliards d’investissements, la quasi totalité de ces fonds sont peu ou prou complètement mobilisés d’ores et déjà. Ces 4,1 milliards concernent les mixages de fonds publics-privés, l’assistance technique aux intermédiaires financiers et les garanties. Sur le volet du climat d’investissement - qui est en dehors de cette enveloppe, mais fait partie du Plan d’investissement extérieur – les montants devraient être beaucoup plus importants, de l’ordre du milliard d’euros chaque année, auxquels s’ajoutent les montants mobilisés par ailleurs par les États Membres de l’UE.
Améliorer la réglementation sectorielle
Continuer à améliorer le climat des affaires en Afrique peut s’avérer néanmoins très compliqué, tant la diversité du continent est grande et les situations différentes d’un pays à l’autre. Globalement cependant, les index de la Banque mondiale montrent que l’Afrique est le continent qui progresse la plus vite dans la réforme du climat des affaires, à l’instar du Rwanda, de l’Ile Maurice ou du Sénégal. Aux yeux de Bruxelles, il y a vraiment une responsabilisation très forte de la part des gouvernements pour améliorer la réglementation sectorielle, par exemple dans le domaine des énergies renouvelables.
« Certes, il reste des problèmes réels comme cela a été dit lors de la table ronde de ce matin, mais il y a des progrès qui sont faits notamment en matière de facilitation du commerce, d’accès aux financements, souligne Axel Pougin de la Maisonneuve. En définitive, nous sommes dans une phase où se met en place une émulation réciproque des pays africains face aux flux d’investissements locaux, régionaux, étrangers qui augmentent considérablement sur le moyen terme ». Or force est de constater que ces investissements vont dans les pays qui sont les plus accueillants pour les investisseurs, où la réforme de la gouvernance, par exemple en termes de corruption, est la plus convaincante, tout comme celle de l’enregistrement des investissements, etc. Sans oublier les pays où la distribution énergétique est stable qui ont, eux aussi, un avantage comparatif. « Au bout du compte, estime le Chef d’Unité adjoint, c’est l’amélioration générale du climat d’investissement dans toutes ses composantes qui permet de générer les millions d’emplois nécessaires en Afrique ».
Consultation du secteur privé
Autre facette essentielle que les dirigeants de la ZLECA vont devoir prendre en compte : la consultation du secteur privé au moment de prendre des décisions. Ce qui est encore, semble-t-il, très insuffisamment le cas dans beaucoup de pays africains. Pourquoi est-ce important ? A cet égard, l’histoire du Marché unique est éclairante puisque celui-ci s’est notamment construit sur la question centrale des normes électriques, techniques, sanitaires, phytosanitaires, etc. Jusqu’à devenir bon an, mal an par rapport aux États-Unis, le premier marché du monde. Or c’est principalement par un dialogue entre le secteur privé qui proposait des normes ensuite examinées et discutées par les institutions européennes, avec des experts prenant en compte d’autres points de vue tels que l’intérêt général européen, pour arriver à un consensus et établir la norme en accord entre le niveau politique et le niveau du secteur privé.
« Notre expérience à l’Union européenne, assure Axel Pougin de la Maisonneuve, est vraiment celle de la construction d’un marché régional continental, en collaboration entre le secteur privé et le secteur public. Cette participation du secteur privé, c’est l’expérience de l’Union européenne et je ne pense pas qu’il y ait une alternative à cela. La question de la participation du secteur privé à la construction de la ZLECA est absolument clé ».
L’UE en soutien
La situation variant d’un pays à l’autre, c’est au niveau de chaque État que cela se joue, chacun devant renforcer les instances de dialogue avec le secteur privé. Dans certains pays comme l’Afrique du Sud, le Nigeria, l’Éthiopie ou la Côte d’Ivoire, il y a des instances de dialogue qui fonctionnent relativement bien. Dans d’autres, il faut les renforcer considérablement. L’Union européenne se place en soutien avec notamment ses délégations qui, pays par pays, appuient les plateformes de dialogue public-privé pour qu’elles deviennent des instances de dialogue structuré et régulier, portant sur les réels obstacles au commerce et à l’investissement. Pour Axel Pougin de la Maisonneuve, « ces plateformes de dialogue entre le gouvernement et le secteur privé, le business, sont des éléments clés de la construction de la Zone de libre échange ». Une construction à laquelle l’Union continuera d’être particulièrement attentive, puisque le Continent est et demeure une priorité majeure de la nouvelle Commission présidée par Ursula von der Leyen.
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