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Euphrasie KOUASSI YAO, Conseillère du Président Ouattara : « Le Compendium des Compétences féminines est devenu une véritable pépinière pour les entreprises »
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Propos recueillis à Paris par Bruno FANUCCHI
pour AfricaPresse.Paris (APP) @africa_presse
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APP – Quel est l’objet de votre actuelle mission à Paris ?
Euphrasie KOUASSI YAO – J’ai été invitée à Paris par Mme Louise Mushikiwabo, Secrétaire générale de l’Organisation Internationale de la Francophonie (OIF) qui est aussi membre du Conseil mondial de l’International Gender Champion et cofondatrice de la branche parisienne de cette institution, pour participer avec elle à un panel de haut niveau sur le thème de la « déconstruction des stéréotypes sexistes ».
Suivie en ligne – en raison des mesures sanitaires – par les 88 pays membres de l’OIF, cette rencontre fut très riche. Car ces stéréotypes constituent les fondements des inégalités sociales, économiques et politiques entre les hommes et les femmes. Il nous faut donc les « déconstruire » pour avancer en matière d’égalité des chances entre les hommes et les femmes
APP – La Secrétaire générale de l’OIF vient de vous recevoir en audience...
Euphrasie KOUASSI YAO – Mme Mushikiwabo m’a en effet accordé une audience en tête-à-tête au siège de l’OIF, avenue Bosquet, où je lui ai présenté ce que nous envisagions à Abidjan pour fêter en juin prochain le dixième anniversaire du Compendium des compétences féminines de Côte d’Ivoire.
Ce travail a non seulement été élu « meilleur programme africain de valorisation des compétences féminines » par le Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD), mais a également été salué comme une « pratique d’excellence » par l’OIF, par l’UNESCO et même par ONU-Femmes. Car les stratégies que nous avons développées peuvent permettre d’atteindre les Objectifs du développement durable, les fameux ODD.
À l’époque, l’Afrique du Sud a également été distinguée pour le « meilleur programme » en termes de « Paix et réconciliation », le Rwanda pour son programme d’« Économie verte » et enfin l’Ouganda pour la « Prise en charge des réfugiés ». C’était dans le cadre d’une grande réunion que nous avions eu à Addis Abeba (Éthiopie) sur la Coopération Sud-Sud, c’est important à souligner.
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Mme Euphrasie KOUASSI YAO a été reçue au siège parisien de l’OIF par la Secrétaire générale, Mme Louise MUSHIKIWABO. © DR
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APP – Ce dixième anniversaire se fêtera donc à Abidjan ?
Euphrasie KOUASSI YAO – La date n’est pas encore définitivement fixée, mais cela devrait se dérouler en principe au mois de juin sous le parrainage du chef de l’État qui a initié dès 2011 l’idée de ce Compendium. Comme nous sommes pays donateur en termes de « valorisation des compétences féminines », nous allons organiser un grand colloque en invitant à Abidjan tous les pays de l’Union africaine, dont certains ont déjà pris contact avec nous, comme le Mali, la Guinée, le Gabon ou le Bénin. Ce sera donc une formidable occasion pour partager cette riche expérience en faveur des femmes. Et l’OIF comme l’UNESCO veulent y participer et s’associer à l’événement.
APP – Quels ont été vos autres rendez-vous importants à Paris ?
Euphrasie KOUASSI YAO – À l’UNESCO, qui est ma maison mère puisque je suis titulaire de la Chaire intitulée « Eau, Femmes et Pouvoir de Décisions », j’ai rencontré en l’absence de Mme Audrey Azoulay, la Directrice générale, sa représentante intérimaire, Danielle Kilch.
Avec ma délégation, nous avons également été reçues à l’OCDE par la directrice du développement, que j’avais aidée dans l’élaboration du programme SIGI qui donne des statistiques intéressantes et parle des normes de la « déconstruction » pour promouvoir l’égalité des chances. L’OCDE a même qualifié notre programme « Ingénierie du Genre » de meilleurE pratique dans ce rapport.
Mais j’ai surtout été reçue en tête-à-tête pour un petit-déjeuner de travail par Mme Elisabeth Moreno, que je connaissais déjà avant qu’elle ne soit ministre de l’Égalité des Chances. Et nous avons longuement échangé sur notre combat commun en faveur des femmes, sur ce DIXIÈME anniversaire et sur mon livre qui vient de sortir et que je lui ai remis.
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« Ce livre est l’histoire
vraie de mon leadership »
« Ce livre est l’histoire
vraie de mon leadership »
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APP – Vous venez de publier un livre qui résume votre combat précurseur pour l’autonomisation des femmes. N’est-ce pas le livre de toute une vie ?
Euphrasie KOUASSI YAO – Comme le soulignent parfaitement son titre et son sous-titre : « Le secret d’une aventure. Celle que l’on n’attendait pas au sommet... » (Éditions du CERAP). Parler de soi n’est pas évident. C’est un exercice que j’ai toujours redouté, mais j’ai fini par en ressentir la nécessité quand on me demandait toujours à l’issue de mes nombreuses conférences à l’UNESCO si j’avais un document retraçant mon long parcours pour faire bouger les lignes dans ce domaine où les pesanteurs sont lourdes et bien ancrées.
Ce partage d’expérience m’a poussé à lever le voile sur quelques scènes de ma vie familiale, comme celle-ci : quand je suis devenue une femme leader, un problème de relations et de nombreuses difficultés se sont fait jour avec mon mari et j’ai même failli divorcer. Je me suis bien vite rendu compte – Dieu merci ! – que ce n’était pas la bonne voie et il est devenu mon plus fidèle soutien. Nous avons aujourd’hui quatre enfants et trois petits enfants. Et une grande dame d’Abidjan m’a alors confié : « Ce que vous avez dit m’a touché et moi qui étais comme vous au bord du divorce, j’ai suivi votre exemple et j’y ai renoncé ».
Ce fut le véritable déclic me poussant à écrire : je me suis dit alors qu’il fallait mettre tout cela noir sur blanc. Tiré de ma propre expérience, ce livre est l’histoire vraie de mon leadership de développement personnel et professionnel. Il se lit comme un roman, accessible à toutes les femmes de 12 à 99 ans.
APP – Et vous avez fait aussi une grande conférence sur l’emploi des jeunes...
Euphrasie KOUASSI YAO – Cette dernière anecdote m’a également poussé à écrire : lors d’une conférence à l’hôtel Ivoire, j’ai parlé une fois une dizaine de minutes devant plus d’un millier de jeunes, leur donnant des conseils pratiques pour trouver un premier emploi et devenir autonomes. Ils étaient émerveillés et appréciaient visiblement d’entendre ce genre de discours. « Madame, quand vous vous taisez une seule minute, ce sont de nombreuses personnes que vous mettez dans les ténèbres ! », m’a confié l’un d’entre eux venu me trouver à la fin.
Dans ce livre, je rentre dans le creux de la vallée de mes larmes, comme je dis, et j’en ressors avec les victoires que j’ai pu avoir. Les jeunes ont besoin de ce retour d’expériences car, en Côte d’Ivoire comme dans beaucoup de pays d’Afrique, le problème numéro un auquel ils se trouvent confrontés, c’est précisément le chômage.
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Mme Euphrasie KOUASSI YAO a été reçue par Mme Élisabeth MORENO, ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes, de la Diversité et de l’Égalité des chances. © DR
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APP – C’est votre premier livre, un peu autobriographique ?
Euphrasie KOUASSI YAO – Oui, mais il y en aura bientôt un second qui parlera davantage de mes réalisations concrètes et de l’impact de mon travail sur les femmes et les jeunes avec de nombreux témoignages. Mais j’ai préféré sortir d’abord celui-ci, consacré à ma vie, pour que tous sachent que je ne suis pas née avec une cuillère dorée dans la bouche !
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« Accroître l’entrepreneuriat
féminin en Côte d’Ivoire »
« Accroître l’entrepreneuriat
féminin en Côte d’Ivoire »
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APP – Où en est aujourd’hui le Compendium, qui est la grande réalisation de votre vie ?
Euphrasie KOUASSI YAO – Lancé le 4 octobre 2011, il y a dix ans, le Compendium des Compétences féminines de Côte d’Ivoire, dont je suis la coordinatrice, réunit aujourd’hui plus de 15 000 femmes – de toutes conditions – librement inscrites dans sa base de données. Cela a créé un environnement favorable à la prise en compte du Genre en Côte d’Ivoire où l’on a bousculé les valeurs et fait évoluer les mœurs.
Un seul exemple me semble très parlant : on a formé pendant six mois un millier de femmes pour qu’elles puissent se présenter aux élections législatives. On a eu ainsi 328 candidates pour les législatives de 2016, contre seulement 105 pour le scrutin précédent en 2011. Si l’on continue sur cette voie, la vie politique va donc évoluer et les données vont réellement changer. Car, chez nous, une maxime populaire disait jusqu’à présent qu’une « bonne femme » ne peut pas prendre la parole en public et je voulais lutter contre ce genre de stéréotypes, en prouvant le contraire.
APP – Les candidates aux élections, c’est important ?
Euphrasie KOUASSI YAO – Bien sûr ! Je vous donne un dernier exemple : une femme de niveau CP est devenue députée et c’est une grande première. Elle a été formée avec les autres. Au début, elle ne se faisait pas confiance même si elle avait toute la population locale avec elle, mais après notre formation elle a pris confiance en elle. Cela veut dire que c’est possible.
En 2016, le président de la CEI (Commission électorale indépendante), Youssouf Bakayoko, s’était adressé à nous en déplorant qu’il n’y ait que 31 % de femmes inscrites sur les listes électorales. Mais après deux semaines de sensibilisation menées par notre réseau de femmes et nos équipes, il y en eut finalement 49 %. Voilà une action concrète réussie, dont il nous a félicitées.
Nous avons aussi réalisé un Annuaire qui compte aujourd’hui 1 003 femmes cadres (Bac+3), dans lequel les administrations ou entreprises peuvent piocher pour trouver les profils qu’elles recherchent. Et quand j’étais ministre (en 2016 et 2017), j’ai fait bouger les lignes en faisant nommer 200 femmes à des postes importants. Il n’est plus possible de dire aujourd’hui que l’on ne trouve pas de femmes compétentes.
APP – Quelles sont aujourd’hui les priorités économiques des Ivoiriennes ?
Euphrasie KOUASSI YAO – En Côte d’Ivoire beaucoup de femmes travaillent dans le secteur informel ou dans le milieu rural et un Fonds d’appui aux femmes de Côte d’Ivoire, géré par Mme Dominique Ouattara avec 50 milliards de francs CFA, prête aux femmes dans le besoin et celles-ci remboursent à un taux raisonnable.
Nous faisons, quant à nous, des actions stratégiques en permettant aux femmes de briguer des postes ou de créer leurs propres entreprises. Nous les y aidons et beaucoup d’entre elles se sont ainsi lancées dans l’événementiel, l’agriculture, la recherche de fonds, etc.
C’est un mouvement dynamique pour améliorer et accroître l’entrepreneuriat féminin dans notre pays. Le Compendium est ainsi devenu une véritable pépinière pour les entreprises. C’est aussi un outil de cohésion sociale puisque l’on travaille avec toutes les femmes sans distinction d’ethnies, de religions ou de partis politiques. Pendant la grave crise politique que nous venons de traverser depuis 2020, nous avons réuni des femmes de toutes tendances, avec ONU-Femmes, et elles ont joué leur rôle pour apaiser la situation. Je veux leur rendre hommage.
EN SAVOIR PLUS :
www.competencesfeminines.gouv.ci
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DU WEBI 2 DU CAPP : « L’état de la coopération économique
Europe-Afrique et comment la dynamiser » (15 06 2021)
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Cliquez sur ce titre ou l’image ci-dessous et accédez au REPLAY de notre WEBI 1 DU CAPP : « LES OUTILS DE LA CONFIANCE POUR ENTREPRENDRE EN AFRIQUE » (21 04 2021)
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