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EMERGINGValley – Henri Ousmane GUEYE, cofondateur et DG d’Eyone : « Mon rêve a toujours été de créer une entreprise de services numériques au Sénégal »

8 avril 2021
EMERGINGValley – Henri Ousmane GUEYE, cofondateur et DG d'Eyone : « Mon rêve a toujours été de créer une entreprise de services numériques au Sénégal »
À la tête d’une start up en pointe dans le domaine de la santé, Henri Ousmane Gueye a un parcours exemplaire. Il témoignait ce jeudi au sein d’Emerging Valley d’Aix-Marseille, et va encore plus loin dans cet entretien exclusif où il se confie sur l’événement tragique qui a renforcé son engagement pour la digitalisation des dossiers médicaux…

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Marseille, de notre envoyé spécial Bruno FANUCCHI
pour AfricaPresse.Paris (APP)
@africa_presse

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Que signifie « Eyone » ?

Henri Ousmane Gueye – Eyone est une entreprise éditrice de logiciels qui travaille dans le domaine de la santé pour améliorer la prise en charge des patients. Eyone veut dire en sérère, un des dialectes du Sénégal : « Allons-y ensemble ! ». Nous avons choisi ce nom pour symboliser deux choses. Le fait tout d’abord que l’entreprise a été créée par des amis d’enfance et, deuxièmement, que l’on développe des plateformes collaboratives qui permettent aux acteurs d’échanger des informations. Alors, ensemble, améliorons la qualité de la prise en charge médicale. Ensemble, sauvons des vies.

Comment est née votre entreprise ?

Henri Ousmane Gueye – Nous sommes partis d’un constat, la complexité du parcours de soin. Les patients perdent beaucoup de temps dans le cadre de leur prise en charge à répondre aux mêmes questions et à refaire souvent les mêmes examens. Et même les professionnels ont des problèmes pour disposer des données de qualité.
Notre solution consiste à mettre en place un système de santé connecté, où nous digitalisons l’activité des professionnels de santé pour leur permettre de gérer les dossiers patients, les facturations, les organisations, et aussi d’interagir avec le patient, lequel dispose, d’un carnet de santé électronique.

C’est votre première participation à Emerging Valley ?

Henri Ousmane Gueye – C’est la deuxième fois que je viens. En 2018, nous faisions partie de la cohorte du SIBC, qui est un programme d’accompagnement de l’AFD se déroulant à Marseille à peu près en même temps qu’Emerging Valley, nous permettant ainsi de participer aussi à cet événement. J’ai donc participé à The Camp en 2018.

Voulez-vous revenir sur votre formation et votre parcours professionnel ?

Henri Ousmane Gueye – Aujourd’hui âgé de 37 ans, marié et père de deux petits garçons, j’ai fait mes études supérieures en France après avoir passé mon bac au Sénégal. J’ai suivi une formation d’ingénieur informatique à l’école Epita (Ecole pour l’informatique et les technologies avancées) et j’ai commencé mes premières expériences professionnelles en France dans des entreprises comme CapGemini et Société Générale. Mais mon rêve a toujours été de créer un jour une entreprise de services numériques dans mon pays d’origine, le Sénégal.

C’est à Capgemini que j’ai vraiment commencé ma carrière en tant que développeur, chef d’équipe, puis ingénieur spécialiste, ce qui m’a permis surtout de travailler avec d’importants clients sur de grosses problématiques d’architecture informatique. C’est cette expérience là que j’essaie aujourd’hui de répliquer en Afrique, dans le domaine de la santé, un secteur assez complexe où il y a beaucoup d’acteurs à faire interagir et beaucoup d’informations à échanger.
Après quelques années d’expérience, j’ai donc créé mon entreprise à la fin de 2015.

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« Face à l’épidémie,
on s’en sort pas si mal au Sénégal »

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L’informatique, c’est une véritable passion ?

Henri Ousmane Gueye – L’informatique, c’est mon métier, ce que je sais faire. Ma passion c’est l’entrepreneuriat. Mon autre grande passion, c’est le sport. J’adore le sport et, comme beaucoup de jeunes Sénégalais j’ai fait du foot à un bon niveau au sein du Jaariaf de Dakar. Malheureusement, je ne pratique plus aujourd’hui, complètement absorbé par le boulot. D’autant plus que mon entreprise emploie aujourd’hui quatorze personnes à temps plein.

Un mot sur votre passage au sein d’Orange Fab ?

Henri Ousmane Guey – Ce fut un parcours très intéressant pour nous. Nous nous sommes fait beaucoup challenger sur notre vision, sur notre « business modèle », sur nos ambitions. Les équipes d’Orange et de la Sonatel nous ont vraiment surpris par leurs compétences et leur capacité à nous challenger sur des points à améliorer.

Dans notre parcours, Orange nous a apporté de la « notoriété », même si nous avons encore beaucoup de chemin à faire. Quand vous créez votre start up, il y a une première étape où vous devez aller chercher des clients, puis une deuxième étape où vous devez faire connaître la marque pour créer des opportunités et cela a vraiment contribué à faire connaître la marque « Eyone » en termes de visibilité. Le troisième aspect, qui est loin d’être négligeable, c’est notre collaboration avec Orange (l’ex-Sonatel) car ces opérateurs cherchent aussi à se diversifier au-delà de leur métier d’opérateurs télécoms et à intégrer d’autres marchés.

Comment le Sénégal a-t-il fait face à l’épidémie de Covid 19 ?

Henri Ousmane Gueye – Je dirai qu’on s’en sort pas si mal. La première vague, il y a un an, a été très bien gérée au Sénégal. La pandémie a amené tout le monde à se rassembler et à trouver des solutions ensemble. Que ce soit au niveau des acteurs du privé comme du secteur public, il y a vraiment eu une coordination des actions et des réponses concrètes.

Nous avons fait partie des initiatives du secteur privé, avec des solutions basées sur le digital. Le gouvernement, pour sa part, a apporté du soutien aux populations et, surtout, les professionnels de santé en charge de l’urgence sanitaire ont trouvé des stratégies bien adaptées à la période et la maladie a pu être cantonnée et même maîtrisée lors de cette première vague. On a même commencé un temps à fermer les centres de traitement.

Mais il y a eu malheureusement d’autres vagues...

Henri Ousmane Gueye – Lors de la deuxième puis de la troisième vague, ce fut malheureusement plus compliqué à gérer car la particularité du Sénégal – comme de bien d’autres pays d’Afrique – est la part d’économie informelle.

Or, les principales solutions utilisées de par le monde pour lutter contre l’épidémie consistet à recourir à des confinements et couvre-feu qui sacrifient l’économie. Si votre économie est en garde partie basée sur l’informel, vous tuez le « business » des gens et ils commencent rapidement à s’essouffler. C’est devenu très compliqué à gérer pour l’État, et pour tout le monde.

Beaucoup disent maintenant au Sénégal : « Si on ne meurt pas du Covid, on mourra de faim ! ». Et aussi : « Quitte à tomber malade, il faut que l’on ressorte pour survivre et faire vivre nos familles ». L’argument est compréhensible et imparable. Nous sommes dans cette phase là, et j’ai envie de vous dire que l’activité quotidienne a repris en Afrique, avec des restrictions toute théoriques.

Le Sénégal a de surcroît connu ces dernières semaines de graves troubles et violences lors de l’affaire Sonko, qui n’a été qu’une étincelle, car les gens étaient déjà au bout du rouleau.

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« Le Professeur Raoult est un personnage
qui ose, il n’a pas peur »

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Vous êtes Sénégalais et nous sommes à Marseille : que pensez-vous du Professeur Didier Raoult, une célébrité ici comme à Dakar, où il vient d’être décoré le 3 avril par le président Macky Sall ?

Henri Ousmane Gueye – C’est un personnage ! Il a en effet eu l’honneur d’être fait Commandeur de l’Ordre national du Lion, notre plus haute distinction. Mais je pense que dans des situations comme celle-ci, il faut des personnages qui se démarquent, osent et n’ont pas peur. Le Professeur Raoult est de ceux-là. Car la pandémie nous a montré que, pour y faire face, il faut être agile : c’est-à-dire avoir la capacité de s’adapter rapidement et de tenter des choses pour voir s’il y a des résultats. Je le vois donc comme une autorité scientifique qui ose tenter et tester des solutions. C’est important pour pouvoir sortir de cette crise.

Le Professeur Raoult n’a pas eu peur, même si on l’a beaucoup attaqué sur la préconisation de l’hydroxychloroquine associée à l’azithromycine, qui sont pourtant des médicaments dont les effets sont bien connus et reconnus depuis longtemps contre le paludisme en Afrique.
Aujourd’hui, le Professeur Seydi, qui est le responsable des centres de traitement au Sénégal, a d’ailleurs basé ses traitements sur la chloroquine et l’azithromycine, et l’on s’en sort pas mal.

Quel est votre prochain challenge ?

Henri Ousmane Gueye – Mon prochain challenge, c’est de pouvoir transformer l’essai. Aujourd’hui, notre initiative est utilisée, mais on aimerait pouvoir la pérenniser comme solution et passer à l’échelle. On aimerait que cela soit adopté à l’échelle nationale du Sénégal et que l’on puisse avoir un système de santé résilient.
Nous avons réussi à montrer qu’avec des systèmes d’information performants, nous sommes capable de remonter des données pertinentes en temps réel sur la disponibilité des médicaments et des lits, sur les statistiques des différents cas Covid, et cela est primordial dans la réponse à l’épidémie.

Pour nous, le challenge est d’entrer dans la pérennité et l’usage quotidien de ces solutions. Une solution e-santé peut aider aujourd’hui à sauver des vies et créer un véritable impact. J’ai donc envie tout simplement d’aller plus loin dans ce domaine-là.

C’est d’ailleurs un système que vous avez vous-même expérimenté...

Henri Ousmane Gueye – C’est parfaitement exact : j’en ai fait l’expérience tragique puisque j’ai perdu en 2017 ma belle-mère, atteinte du lupus, une maladie chronique, qui n’a pu être traitée convenablement à temps.

Elle devait être prise en charge, mais l’on a perdu beaucoup de temps parce qu’on est allé de structures de santé en structures de santé, où il fallait repasser souvent les mêmes examens. Et l’on s’est finalement retrouvés à devoir la faire opérer dans un hôpital où l’on nous demandait des documents que nous n’avions pas car personne ne maîtrisait son « historique médical ». Je l’ai vue souffrir. Or, dans un système de santé connecté, ces données là sont disponibles en temps réel ! Le médecin accède ainsi à un système où il a tout l’historique du patient et l’on gagne énormément de temps.

Je vous donne un exemple concret que nous avons vécu : une fois opérée, elle avait besoin de sang et on a attendu trois jours qu’un médecin vienne valider cette demande de sang, et elle a fait une crise cardiaque. Dans l’urgence, on est allé d’hôpital en hôpital pour trouver une poche de sang du bon groupe. Trop tard ! Le système avait perdu beaucoup de temps pour une prise en charge efficace. Et ce n’est pas – hélas – un cas isolé !

En savoir plus sur Eyone : www.eyone.net

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