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Tchoune -

Au croisement des traditions, le chanteur - guitariste des « Chants Sacrés Gitans en Provence »

France | 30 juillet 2011 | src.LeJMED.fr
Au croisement des traditions, le chanteur - guitariste des « Chants Sacrés Gitans en Provence »
Aix-en-Provence -

La tradition du chant en Méditerranée est forte : les sonorités des langues catalane, espagnole, provençale et latine sont réunies dans le dernier projet du chanteur et guitariste gitan Tchoune autour du patrimoine musical des « Chants Sacrés Gitans en Provence », actuellement en tournée (et jusqu’en décembre) dans de nombreuses villes – au Sud, surtout.
Découverte du parcours artistique de Jean Fernandez, dit « Tchoune », gitan provençal né à Aix-en-Provence, et qui fait de la musique entre tradition et ouverture.

Photo ci-dessus : Portrait de Tchoune © Philippe Thévenet – Opus 31


Tchoune durant le Concert des « Chants Sacrés Gitans en Provence », au Festival Babel Med Music 2011 à Marseille © Nadia Bendjilali

La région Provence-Alpes-Côte-d’Azur est une des terres séculaires de sédentarisation et de passage de nombreux gitans de toutes origines en Méditerranée. Jean Fernandez, dit « Tchoune », est l’un des artistes de cette diaspora.

Pour qui n’est pas familier du « parlé provençal », son nom de scène est énigmatique. Or, Tchoune est en fait la contraction du vocable provençal « pitchoun », terme qui exprime la tendresse à l’égard d’une personne de petite taille ou d’un enfant. Depuis sa prime enfance, « tout le monde me connaît comme Tchoune ! J’ai donc gardé ce nom d’artiste » explique-t-il.

C’est aussi simple que cela. Tout aussi naturel est son rapport à la musique. « Né dans une famille gitane sédentarisée en Provence, avec des racines andalouses du côté de mon père et catalanes par ma mère, les répertoires des chants, des danses et des musiques gitanes font partie de mon patrimoine et de mon quotidien, depuis toujours. C’est ainsi chez nous ! C’est juste normal ! »


Tchanelas, son groupe avec les filles

Une rencontre ratée avec l’école et le voilà à l’âge de douze ans à faire de la musique dans les rues de sa ville natale. D’Aix-en-Provence aux Saintes Maries de la Mer, mais aussi sur la Côte d’Azur comme à Paris, Tchoune se produit dans différentes formations. Puisant à la source de sa culture d’origine, tout en s’affranchissant des limites, Tchoune, est à l’initiative de la création du groupe Tchanelas, en 1997.

« Tchanelas est un projet unique car, à part moi, ce sont des femmes qui composent le groupe. Des gitanes qui sortent de leur domaine dévolu et traditionnel, la danse, pour aller dans le chant et la pratique musicale. Du reste, après deux opus coproduits, Tchanelas sera signé par le label Warner pour l’album Les Fils du vent en 2003. Une belle aventure qui de 2003 à 2005, nous a amené à faire une tournée internationale. Et puis les filles se sont mariées et elles ont quitté la scène, car c’est dans l’ordre des choses dans notre culture » raconte, modestement, Tchoune.


Une première en 2008 :
Les Chants de Noël des Gitans en Provence

Apprécié par de nombreux autres artistes, il poursuit son chemin sur des scènes internationales et partage des heures en studio notamment avec Alabina, Nadiya, Yuri Buenaventura ou encore Manitas de Plata, tout en s’engageant dans des projets à dimension méditerranéenne avec des artistes marseillais. Il est notamment soliste dans la Cie Rassegna (voir notre portrait-Persona Grata de Bruno Allary) ou aux côtés de la chanteuse Sylvie Paz pour l’écriture du projet « Flamencopéra ».

Sa force d’interprétation alliée à une voix puissante font de lui un artiste rare. Sur une idée du compositeur et guitariste Bruno Allary, il se met à travailler sur un répertoire resté jusque là dans le domaine privé, celui des chants de Noël des gitans en Provence. À la demande du Conseil Général des Bouches du Rhône, ils écrivent et codirigent pour Noël 2008 un spectacle original de Chants de Noël Gitans en Provence (pour 8 musiciens et 2 danseuses).
Quinze représentations sont données de ce programme : la rencontre gitan/gadgo (non-gitan) est un succès auprès du public, une évidence pour les artistes issus des cultures gitane et provençale, tellement les musiques et chants gitans font partie intégrante de l’imaginaire collectif provençal partagé.


La genèse des « Chants Sacrés Gitans en Provence » :
la rencontre décisive avec Philippe Thévenet, d’Opus 31

Reste que présenter en public les chants et danses traditionnellement interprétés en famille est une première et que cela doit trouver un prolongement. C’est de la rencontre entre Philippe Thévenet, directeur artistique de l’agence d’ingénierie culturelle Opus 31 et de Tchoune que naît, à l’automne 2009, le projet des Chants Sacrés Gitans en Provence.

Ce projet réunit quatre chanteurs et musiciens (guitaristes) gitan, andalou et provençal, ainsi qu’un guitariste soliste et un claviériste flamenco (une danseuse flamenco rejoint, dans certains concerts, le groupe) autour d’une création forte qui défend une vision et une lecture de la liturgie, entre tradition et innovation.

L’idée de cette création, est, comme l’explicite Tchoune de : « mettre les traditions sacrées gitanes au centre du projet avec une ouverture sur les autres cultures. Une rencontre entre des répertoires autour des chants sacrés interprétés dans les familles gitanes, qui s’ouvre aussi aux traditions des Chemins de Saint Jacques et des Saintes Maries de la Mer, illustre la Nativité, les chants sacrés des mariages gitans et la rencontre des Gitans et des Sépharades. Et des chants en langue provençale qui sont consacrés aux chants de mer reliés au culte de Marie. »

Philippe Thévenet, d’Opus 31, évoque la genèse de ce projet qui se nourrit de la complicité entre chacun des acteurs :
« Depuis sa création en 1994 par Catherine Crouzat, Opus 31 développe différents axes jusqu’à s’ouvrir à des projets artistiques autour des musiques traditionnelles jusqu’aux musiques sacrées, en somme des formes acoustiques qui croisent des répertoires savants avec un ancrage traditionnel. Dans cette dynamique, j’ai porté toute mon attention sur les chants polyphoniques et nous nous sommes occupés du quatuor de chanteuses Balkanes, qui interprètent des polyphonies profanes et sacrées de Bulgarie.

« Quand j’ai découvert le projet des chants de Noël gitans, six mois après sa réalisation, j’ai pris contact avec Tchoune. La première fois que je l’ai rencontré, je lui ai proposé de monter le projet des Chants Gitans en Provence : constituer une petite équipe d’artistes pour lesquels les traditions sacrées sont en somme une partie intégrante de leurs vies. Un projet avec beaucoup de noblesse et d’humanité. Je n’ai appris que des mois plus tard que son accord d’alors n’était qu’une simple formule de politesse, car il pensait que ma proposition était une de ces nombreuses paroles en l’air !…

« En réalité, nous avons constitué autour de Tchoune qui est le chanteur et guitariste mais aussi le directeur artistique de cette aventure, une première équipe dès septembre 2009 pour enregistrer une maquette de quelques titres, base de notre prospection pour une première tournée durant l’été 2010. »

Dès les premières scènes cet été 2010, le spectacle a attiré l’attention des professionnels et des publics. « Le programme des Chants Sacrés faisait vraiment déplacer les gens, confie-t-il. Nous constations que les lieux étaient insuffisants, pour le plus grand regret des organisateurs et de notre équipe, pour accueillir les personnes venues en grand nombre découvrir cette création. Sur les dix concerts donnés lors de cette tournée, je me souviens par exemple qu’au Festival Estivada à Rodez, (Festival inter-régional des cultures occitanes), la salle de 350 places environ était pleine et un public tout aussi nombreux n’avait pu trouver place au concert. Le surlendemain on jouait dans un parc à Bourges, et là pour un parterre de chaises de 450 places, nous avons accueilli jusqu’à 1 600 personnes ».


Plus de trente concerts pour la tournée 2011

Le groupe ayant constaté que ce projet cristallisait beaucoup d’attente, Tchoune et Opus 31 ont décidé d’engager des moyens à la mesure de cette création. En 2011, une nouvelle étape a été réalisée autour de trois axes : la programmation dans le cadre du Festival Babel Med Music à Marseille, accélérateur de vente du spectacle auprès des programmateurs, la sortie en juin 2011 d’un disque produit par Tchoune et une tournée estivale 2011 avec plus de 30 concerts en France et en Europe.

« Lors de Babel Med Music, nous avons eu des contacts avec l’Algérie. Et des dates sont également en discussion dans le pourtour méditerranéen, en Tunisie et en Israël. J’aimerais que cette musique voyage, reprend Tchoune, car c’est l’esprit de ce projet que d’être positionné sur un territoire, la Provence, une Provence ouverte sur la Méditerranée ! L’ouverture sur des langues qui cohabitent, des timbres et des rythmes différents, c’est cela la richesse de la musique. »

Et Tchoune de raconter la manière dont se fabrique cette réunion de solistes :
« Chacun d’entre nous créée et adapte des morceaux. D’une réunion de solistes et de répertoires, nous allons vers un travail à trois voix : Jean-Luc Di Fraya, qui vient de l’univers du jazz, a rejoint notre équipe récemment, sur le chant provençal, et notre collaboration est de grande qualité. Gil Aniore-Paz, (chanteur, guitariste et compositeur, qui partage sa vie entre Marseille et sa terre natale, l’Andalousie) et moi avons une belle complicité, acquise de longue date. Nous voulons aller plus loin et associer nos voix dans l’esprit des chants polyphoniques. »

Ce sera tout l’objet de leur résidence de travail à la Cité de la Musique de Marseille, courant octobre 2011, que cet approfondissement du travail polyphonique et le concert de fin de résidence devra compter deux ou trois nouveaux chants issus de ce chantier de création.

Inviter ceux qui se trouveront à Marseille le 7 octobre 2011 au soir à se rendre à la Cité de la Musique serait un peu coup de cœur. Ça l’est, certes, mais c’est aussi un point de vue partagé par la chanteuse Camille, qui en juin 2011, invitée sur Radio Nova par Rémy Kolpa Kopoul, disait que son grand coup de cœur de l’année 2011 était Tchoune. Dont acte sur ce consensus de beauté.


Nadia BENDJILALI

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Les prochaines dates de la tournée 2011 en France

 06 août : Plan d’Aups La Sainte Baume (83) – Semaine de la Guitare - Église
 10 août : Anglès (81) – Musique d’été - Église
 11 août : Ambazac (87) – Festival du Haut Limousin - Église
 12 août : Saint Benoit du Sault (36) – Festival des Bouchures - Église
 14 août : Aigues Mortes (30) - Église
 26 août : Festival des Alpilles (13) – Saint-Étienne du Grès - Arènes
 17 septembre : Montmaur (05) – Nuits du Château de Montmaur – Chateau
 23 septembre : Sanary sur Mer (83) - Théâtre du Petit Galli
 01 octobre : Collioure (66) – Festival Les Troubadours chantent l’Art Roman - Église
 03 > 07 octobre : Marseille (13) - Résidence à la Cité de la Musique
 07 octobre : Marseille (13) - concert à la Cité de la Musique – Auditorium
 10 novembre : Charnay-les-Mâcon – Symphonies d’Automne
 11 novembre : Mazan - Pays de Carpentras – Festival Itinérant - Église
 10 décembre : Cavaillon – Médiathèque de la Communauté de Communes

En savoir plus :
 Site OPUS 31

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