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Au Forum de Bamako / ALPHADI « Le Magicien du désert » appelle les pays du Sahel à se réconcilier avec la France

31 mai 2024
Au Forum de Bamako / ALPHADI « Le Magicien du désert » appelle les pays du Sahel à se réconcilier avec la France
Le célèbre styliste africain ALPHADI brandit son trophée. © Hady Photo
Le fondateur du FIMA a reçu le Prix d’Excellence du Forum de Bamako lors de la cérémonie de clôture de sa XXIVe édition consacrée à la culture. Celui que l’on surnomme depuis longtemps le « Magicien du désert » considère qu’il faut « se mettre autour d’une table et repartir sur de nouvelles bases avec la France et nos partenaires européens ». Entretien.

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Propos recueillis par notre envoyé spécial à Bamako (Mali),
Bruno FANUCCHI pour AfricaPresse.Paris (APP) @africa_presse

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AfricaPresse.Paris (APP) – Quelle est votre première réaction à cette distinction qui n’est pas que honorifique ?

ALPHADI – Je suis très fier et très content d’avoir pu me trouver au Mali à ce moment-là. Très fier que la Fondation Forum de Bamako, que préside Abdoullah COULIBALY, me décore et m’honore pour l’ensemble de mon travail et la promotion de la culture en Afrique au terme d’une édition du Forum dont le thème était cette année « Culture, Réconciliation, Paix et Développement ». D’autant plus que le FIMA (Festival International de la Mode en Afrique), le festival que j’organise depuis 1998 pour mettre à l’honneur la créativité et la beauté africaine s’articule toujours sur ce même thème : « Paix, Culture et Développement ». Nous sommes donc parfaitement en phase car ce Prix met à l’honneur mon expertise et mon festival.

APP – N’est-ce pas une belle reconnaissance pour votre apport précieux à la culture du Continent ?

ALPHADI – Absolument. J’ai été d’autant plus honoré que, né à Tombouctou, je suis à la fois d’origine malienne par mon père et nigérien par ma mère et que j’incarne ces deux cultures. Aujourd’hui, on est en train de travailler sur la culture dans toute sa dimension : l’éducation, le côté social, l’autonomisation de la jeune fille, etc.

APP – Les industries créatives dans de nombreux domaines comme le mode ne peuvent-elles pas être source d’emplois et de revenus pour toute une jeunesse qui ne manque pas de talents ?

ALPHADI – Tout à fait. J’ai vu dans la haute couture toute sa dimension éducative, pour aider les jeunes à comprendre que la culture peut créer de nombreux emplois pour les femmes et les jeunes. La culture peut de surcroît nous apporter une réconciliation dont nous avons besoin entre nous autres Africains, ainsi qu’entre l’Afrique et l’Europe. Et cela est très important.

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« Nos peuples souffrent car ils n’ont plus
d’électricité, plus de travail ni d’espoir »

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APP – À Bamako même, vous avez bien d’autres projets concrets. Voulez-vous nous en parler ?

ALPHADI – Tout à fait. Je suis venu à Bamako car j’ai acheté un terrain et une maison pour y ouvrir un « Café Alphadi », comme il en existe déjà à Abidjan (en Côte d’Ivoire) et à Niamey (au Niger), dans le quartier de Sébénikoro, non loin de la résidence de l’ex-président IBK. C’est une belle maison dans laquelle on a déjà commencé à travailler sur le textile malien et africain. Je suis venu aussi pour travailler avec l’industrie du coton au Mali, avec le bogolan, les teinturières, et les brodeuses.

Dans ce complexe, dénommé « Café Alphadi », nous faisons la promotion non seulement de la mode et de la haute couture, mais également de tous les arts comme la peinture, la maroquinerie et, bien entendu, de tous les talents africains. C’est le propre de ce concept.

Comme la vie quotidienne est très dure aujourd’hui au Mali où les coupures incessantes d’électricité durent parfois plus de 24 heures, ce « showroom » , destiné à montrer à la jeunesse que le combat culturel est primordial, prendra son véritable envol quand il y aura enfin du courant !

Entouré du ministre malien de l’Artisanat, de la Culture, de l’Industrie hôtelière et du Tourisme, et d’Abdoullah COULIBALY, le styliste ALPHADI reçoit le Prix d’Excellence du Forum de Bamako. © Hady Photo

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APP – Comment sortir de la grave crise dans laquelle semblent s’enfoncer depuis de longs mois les pays du Sahel comme le Mali, le Niger ou le Burkina Faso ?

ALPHADI – Pour nous autres Africains et notamment ces trois pays de l’AES (Alliance des États du Sahel), le problème n’est pas de faire la guerre aux États-Unis ou à l’Europe, c’est au contraire de s’entendre et d’aplanir nos divergences pour travailler ensemble. Nous sommes d’anciennes colonies françaises, devenues des nations souveraines qui parlons français, et l’on ne peut pas tout abandonner et renier du jour au lendemain sous prétexte d’être nous-mêmes, ce n’est pas sérieux. Ce n’est pas ce que je recherche et ce que nos peuples attendent...

APP – La culture peut-elle contribuer à ramener la paix dans ces pays ? Quelles initiatives envisagez-vous de prendre pour y apporter votre pierre ?

ALPHADI - Je crois, en effet, que l’entente entre nous d’abord, Maliens comme Nigériens, puis avec l’Europe, est indispensable à la paix sociale et au développement économique de nos pays. Il faut se mettre autour d’une table et repartir sur de nouvelles bases avec la France et nos partenaires européens parce que nos peuples souffrent. Ils n’ont plus d’électricité, ni de travail ni d’espoir.

Il y a eu certes beaucoup de malentendus et d’incompréhensions avec la France, mais il n’y a pas d’autre issue que de négocier et de trouver des solutions ensemble pour mieux répartir entre nous les avantages d’une réelle et plus juste coopération dans l’équité et la sérénité.
La culture peut y aider sérieusement et, dans ce cadre, mon seul vœu est d’y apporter ma modeste contribution. Il y a des milliers de Franco-Maliens comme de Franco-Nigériens, nous sommes parents et cela n’a pas de sens de se faire la guerre ! Il faut au contraire s’entendre et travailler main dans la main. Je suis Ambassadeur pour la Paix de l’UNESCO et mon combat est donc celui-là.

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« Éviter à tout prix que de jeunes
Africains ne meurent en Méditerranée »

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APP – Où en sont vos préparatifs pour la XVe édition du FIMA, initialement prévue l’an passé à Niamey et reportée en raison des événements et du coup d’État de juillet 2023 ?

ALPHADI – Nous sommes en train d’y travailler avec acharnement matin, midi et soir car il y a deux ou trois pays qui veulent le FIMA chez eux. Mais tant que nous n’avons pas le parrainage officiel de l’un d’entre eux, je ne peux pas vous citer de nom, comme vous le comprendrez. Mais cela avance très bien pour cette prochaine édition prévue en principe au mois de novembre.

APP – Le FIMA semble d’ailleurs faire des petits. Ne serez-vous pas le parrain du FIMOBKO (Festival international de la mode à Bamako) qui devrait se tenir en juillet dans la capitale malienne ?

ALPHADI - Ce sont des jeunes qui, avec Daouda KODIO, ont lancé le FIMOBKO et m’ont demandé d’être le parrain de leur IVe édition qui se déroulera à Bamako du 4 au 7 juillet prochainws sur le thème : « La mode au service de la Réconciliation nationale ». Avec trois temps forts : un concours des jeunes créateurs et mannequins, puis la Nuit du coton africain au Musée national de Bamako et, pour terminer, un défilé de haute couture à l’Hôtel « Au Bord de l’Eau » sur le fleuve Niger.

J’ai bien entendu accepté tout de suite car c’est une très bonne initiative et une équipe qui fait un travail formidable. Je reviendrai donc à Bamako car le Mali a plus que jamais besoin de paix et de réconciliation et cet événement va y contribuer grandement en donnant une belle image du pays. C’est pourquoi je souhaite qu’il bénéficie de tout l’accompagnement nécessaire pour faire un travail de qualité.

APP – Un mot d’espoir adressé à la jeunesse africaine, en conclusion de notre entretien ?...

ALPHADI – La jeunesse africaine a grand besoin de travail, de compréhension et d’espoir. À Niamey, avec le soutien du Fonds des Nations unies pour la Population, j’ai ainsi ouvert l’École Supérieure de la Mode et des Arts qui accueille déjà quelque 70 jeunes filles auxquelles nous dispensons une formation destinée à leur assurer un emploi. C’est un projet concret qui ne demande qu’à grandir.
Car il faut éviter à tout prix que de nombreux jeunes Africains, désespérés et sans emploi, ne cherchent qu’à fuir en Europe par tous les moyens et finissent par mourir en mer en Méditerranée sur des radeaux de fortune. Comme déjà plusieurs milliers d’entre eux...

POUR EN SAVOIR PLUS :
www.fima-africa.com

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