Au Forum France-Gabon de Paris / Vanessa EYIGHA-ENTHOU, Consultante en DD : « Les pays du bassin du Congo ont un potentiel écologique énorme »
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Propos recueillis par Bruno FANUCCHI pour AfricaPresse.Paris (APP)
@africa_presse
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AfricaPresse.Paris (APP) – Pouvez-vous nous résumer votre parcours très original ?
Vanessa EYIGHA-ENTHOU - Je suis Consultante internationale en développement durable, spécialisée en transition écologique. J’ai débuté dans la gestion des projets environnementaux en 2014 à l’âge de 22 ans. Je venais d’obtenir ma licence en management des organisations option GRH et, en attendant ma rentrée scolaire en Master RH, j’ai découvert au cours d’une recherche de job étudiant, Ophir Energy, une firme de l’industrie du pétrole et du gaz.
Cette entreprise d’origine britannique m’a proposé de participer gratuitement à une formation de technicien de l’environnement. J’ai accepté et me suis découverte une passion pour les sciences environnementales. À la suite des examens et stages, j’ai su me démarquer par de bons résultats et mon profil a tout de suite séduit mes supérieurs. Des propositions de contrats se sont enchaînées. J’ai décidé de prendre une année sabbatique en 2015 pour me consacrer totalement à ce métier.
Dès 2016, j’ai obtenu un contrat de Coordinatrice de projet environnemental dont le but principal était de former à mon tour d’autres techniciens de l’environnement en même temps que je poursuivais un Master en QHSE. C’est un projet que j’ai cogéré sous la houlette de la Wildlife Conservation Society, une ONG américaine spécialisée dans la protection de la nature, faune et flore. Forte de cette expérience, j’ai décidé de réorienter mes études.
APP – Et vous venez en France en 2019 pour y poursuivre de nouvelles études ?
Vanessa EYIGHA-ENTHOU – J’ai opté, ici en France, pour un diplôme en Ingénierie et Management de l’environnement et du développement durable. De nouvelles études que j’ai financées grâce à mes cinq ans de travail de 2014 à 2019 et j’ai obtenu mon diplôme en 2022.
Comme toujours, mon parcours atypique attire l’attention des recruteurs. J’ai ainsi été contacté par Taho, un cabinet privé basé à Paris et exerçant dans les métiers des Télécoms et de l’Environnement. Ils travaillent sur des projets de pose de fibre optique dans le monde entier. Leurs clients sont uniquement des gouvernements et ces projets-là sont très souvent financés par la Banque mondiale.
APP – Le Développement durable, c’est une thématique à la mode, mais concrètement que faites-vous exactement ?
Vanessa EYIGHA-ENTHOU - C’est vrai, mais concrètement j’accompagne les acteurs du monde économique à répondre aux enjeux économiques, environnementaux et sociaux qui sont les leurs pour atteindre les Objectifs du Développement Durable (ODD) fixés par les Nations Unies. À l’échelle d’une entreprise, cela va être de l’aider à limiter l’impact de son activité sur l’environnement ou le territoire dans lequel sont implantées ses activités par le biais de la mise en place de la « Responsabilité Sociétale de l’entreprise » (RSE).
À l’échelle gouvernementale, mon rôle va plutôt consister à définir un cadre juridique – s’il n’existe pas encore –, une politique socio-économique et environnementale afin de permettre à cet État de continuer de croître (volet économie), tout en préservant ses écosystèmes, son patrimoine écologique, sa biodiversité (volet environnemental) par des méthodes définies au préalable grâce à un audit de l’existant et, enfin, d’assurer non seulement le bien-être des populations actuelles, mais aussi de garantir celui des générations futures (volet social).
APP – Avec votre expertise, quel genre de clients démarchez-vous ?
Vanessa EYIGHA-ENTHOU - Grâce à mon parcours atypique, mes premières expériences professionnelles ont été avec des entreprises internationales d’origine anglaise, française et américaine avec un fort brassage culturel. Dès mes 22 ans, alors que je poursuivais mes études supérieures, j’ai été embauchée sur un projet environnemental qui réunissait 60 nationalités différentes.
C’était en 2014. J’étais très souvent la seule Noire, la seule Africaine et la seule Gabonaise. Projet soutenu par l’entreprise Ophyr Energie, spécialisée dans la recherche sismique du pétrole et du gaz en eaux profondes. Grâce à ma méthode de travail axée sur des résultats concrets et mon style de management stratégique, j’arrive aisément à donner satisfaction. Mon profil est directement recherché et recommandé. J’ai donc très peu démarché dans ma vie professionnelle.
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« Le Gabon est déjà leader dans
la préservation des forêts tropicales »
« Le Gabon est déjà leader dans
la préservation des forêts tropicales »
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APP – Avez-vous déjà des projets concrets pour le Gabon ?
Vanessa EYIGHA-ENTHOU - Bien évidemment ! Grâce à mes nouvelles fonctions de Responsable Stratégie Développement Durable & Transition Écologique au sein de l’ADAC (Agence pour le Développement de l’Afrique Centrale), que préside Alain FOURNIER, je suis dans un projet concernant le bassin du Congo. Ce qui m’a encouragée à accepter cette offre, avec empressement et même une certaine excitation, c’est que ce projet est duplicable au Gabon, dont les forêts sont reconnues pour leur grande capacité de captation du carbone.
Les pays du bassin du Congo ont un potentiel écologique énorme avec presque les mêmes problématiques. J’ai donc des projets de développement qui permettraient au Gabon de se positionner comme leader, en matière de durabilité, dans la sous-région.
APP – Vous étiez d’ailleurs au « One Forest Summit » de Libreville, en mars 2023. Qu’en avez vous retenu ?
Vanessa EYIGHA-ENTHOU – Les forêts du Gabon jouent un rôle crucial dans la lutte contre le changement climatique et la perte de biodiversité. Organisé en partenariat avec la France, ce « One Forest Summit » a permis de promouvoir une approche plus durable de la gestion des forêts. Le Gabon s’est engagé à développer une économie forestière durable au profit des populations locales, en préservant l’environnement. Ce fut un succès pour le Gabon qui a permis de renforcer sa position de leader dans la préservation des forêts tropicales et de mobiliser des financements importants.
APP – Vous participiez le 29 mai au Forum économique Gabon/France, organisé à Paris, et vous avez même eu l’opportunité de parler au Président de la Transition. Racontez-nous, si vous le voulez bien, cet aparté...
Vanessa EYIGHA-ENTHOU – Ah, quel sacré moment ! Sans entrer dans les détails, car je suis tenue par un accord de confidentialité, j’ai évoqué avec son Excellence Brice Clotaire OLIGUI NGUEMA un projet de gestion durable des forêts d’un des pays du bassin du Congo, sur lequel il m’a été proposé d’être Project Manager. C’est un projet d’envergure gouvernementale qui pourrait être dupliqué au Gabon.
Je lui disais tout simplement qu’il était urgent de faire évoluer le travail déjà fait dans ce secteur pour que le Gabon ne soit pas « largué ». Ces thématiques abordées au cours du Forum – assainissement, agroforesterie, gestion des déchets et ordures ménagères – font d’ailleurs partie du Plan National pour le Développement de la Transition. J’y ai apporté des réponses sous forme de projet-solutions et je lui ai dit que ces propositions ont été remises gracieusement à son Protocole. J’espère qu’ils en feront bon usage.
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« Bon vent
à la Transition gabonaise ! »
« Bon vent
à la Transition gabonaise ! »
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APP – Le Nouveau Gabon vous semble être aujourd’hui une « terre d’opportunités » ?
Vanessa EYIGHA-ENTHOU - Le Gabon « ne semble pas » (rires), le Gabon EST une terre d’opportunités et l’a toujours été. Nous avons traversé un certain nombre de crises qui ont entraîné une fracture, mais c’est à nous – la nouvelle génération – de conjuguer nos efforts pour que cette Nation reste une destination attractive tant sur le plan touristique et économique qu’au niveau de la qualité de vie.
Cela passe d’abord par une mentalité qui donne envie aux investisseurs comme aux touristes de venir chez nous. Un Gabon prospère et pacifique, avec une population au savoir-vivre exemplaire, c’est le meilleur atout du Président de la Transition et nous devons tous l’accompagner, de près ou de loin.
APP – Quelles sont vos autres activités, au sein de la diaspora gabonaise en France ?
Vanessa EYIGHA-ENTHOU - Je fais partie d’une association dénommée Elit, un mouvement qui regroupe l’élite intellectuelle africaine. C’est un cercle de réflexion qui propose des solutions à nos dirigeants africains pour le développement du Continent.
Nous offrons également un accompagnement et soutien scolaire pour encourager les plus jeunes à viser l’excellence académique afin de mieux s’intégrer dans le monde des affaires. C’est un réel vivier de compétences professionnelles des jeunes Africains dynamiques et rigoureux dans leurs méthodes de travail et leurs manières de vivre au quotidien.
Bien qu’étant en Europe, nous songeons à l’avenir du Continent. Les valeurs d’excellence, de résilience et de discipline de vie qui portent Elit sont également les miennes. À la demande du Président Mohamed CISSOUMA, j’ai donc accepté de les rejoindre. C’est avec fierté que je choisis de les mettre en lumière aujourd’hui, grâce à vous.
APP – Un dernier mot pour clore notre entretien...
Vanessa EYIGHA-ENTHOU - Bon vent à la Transition gabonaise ! Je garde espoir que ce pays retrouvera ses lettres de noblesse, car c’est une terre bénie de Dieu. Que la sagesse, l’esprit d’équipe et surtout le patriotisme animent cette équipe de Transition car, comme le dit notre hymne national, là où il y a la bénédiction, « les sorciers, ces perfides trompeurs » rodent toujours pour « semer le poison, répandre la peur et la haine ».
Mais le Président de la Transition, lors de sa rencontre avec les Gabonais de France le 1er juin, a ouvertement déclaré qu’il croit en Dieu et reconnaît au fond de lui que c’est Dieu qui ne l’a jamais laissé. Ces mots ont fortement résonné dans mon esprit. Ce Dieu, qui ne déçoit jamais quand on décide de lui faire entièrement confiance, il verra sa Gloire ! Ce Dieu l’aidera à mener à bon port le bateau qu’on appelle Gabon vers la félicité.
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