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Alain Dupouy, Président du club O2A : « Pourquoi la France n’est pas orpheline d’une politique africaine »

13 septembre 2020
Alain Dupouy, Président du club O2A : « Pourquoi la France n'est pas orpheline d'une politique africaine »
Trois ans après l’élection présidentielle française, comment revisiter les déclarations d’alors du candidat Emmanuel Macron, en 2017 : « la France n’aura plus de politique africaine » ? L’action inspirée du discours (re)fondateur de Ouagadougou, ainsi que l’engagement qui perdure au Sahel, incitent à penser le contraire. Analyse.

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Une contribution d’Alain DUPOUY,
Président du club Objectif Afrique Avenir (O2A)

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Durant la campagne élyséenne, le candidat Emmanuel Macron laissait entendre que des éléments très novateurs seraient introduits dans les relations économiques, politiques et même culturelles, entre le continent africain et la France.

C’était affirmer l’ambition de rénover cette politique – et en tout cas, d’en avoir une ! Il s’agissait de :

- Abandonner la version « étriquée et souvent malsaine » d’une relation bilatérale, fonction des vieux réflexes, constituant ce qu’il était convenu d’appeler la « Françafrique », et cela personne n’aurait pu le contester.

- Élargir la vision des liens, plus transversale et moins segmentée, entre nos pays, et donc présenter une ambition plus large et plus partenariale, en y associant l’Europe, la Méditerranée, et en motivant davantage le secteur privé, les sociétés civiles, et aussi les organisations internationales .
Ce plan avait été parfaitement expliqué, à l’époque, par son conseiller Aurélien Lechevallier (devenu Ambassadeur depuis), dans un entretien mené par Malick Diawara pour Le Point Afrique).

Quelques mois après son élection,le Président s’est exprimé à Ouagadougou, en novembre 2017, pour décliner quelques-unes de ces lignes nouvelles décrivant les priorités résumées par quelques points essentiels : La France doit rester fidèle à sa mission de Défense vis-à-vis de certains pays (notamment au Sahel ) sur mission de l’Onu, continuant ainsi les orientations définies et déjà appliquées par le Président Hollande au Mali – ce qui reste valable aujourd’hui, après la « démission » d’Ibrahim Boubacar Keïta.

Comment la France doit s’impliquer en Afrique

Puis la France doit continuer d’être attentive à ses partenariats économiques, plutôt en régression, non seulement pour ses grandes entreprises mais aussi par son réseau de PME/ETI (du secteur privé, insuffisamment soutenu et pourtant créateur d’emplois), toujours impliqué avec ses homologues africains, plutôt francophones, en privilégiant aussi les liaisons générées par les diasporas africaines, et on pense en particulier aux jeunes nouvelles générations .

Enfin la France doit s’impliquer, et c’est essentiel, dans l’apport prioritaire en faveur de l’Éducation et Formation en Afrique, pas seulement pour accueillir des étudiants en France, mais pour échanger avec des apports sur place ou des créations d’établissements Universitaires.

En début 2018, déjà, le Forum Éducation de Dakar avait intensifié les engagements financiers des nations amies, et pas seulement la France, pour assurer un bel avenir à l’Éducation en Afrique, la base de toute progression sociale et économique. Quant à l’aspect Formation, plus que complémentaire aux efforts faits en faveur de l’Éducation universitaire (parfois un peu hermétique) l’objectif de professionnalisation amenant à une capacité d’emploi réel doit être priorisé.

Alors, c’est tout cela, « la politique Africaine de la France », sous un nouvel éclairage ! Y parvient-on, trois ans après l’élection présidentielle française ?

Une concurrence internationale amplifiée

Vu le « réflexe Africain », d’Emmanuel Macron, ses multiples contacts, voyages et accueils à Paris où il rencontre les dirigeants africains, y compris de l’Est du continent, on peut dire que durant ces années, la politique Africaine de la France, peut être considérée comme active et existe bel et bien. Elle est « en marche »… et probablement apporte sa part à la progression de l’Afrique, dans l’intérêt International – à commencer par l’aide des forces armées pour la lutte contre le terrorisme.

Mais, rien n’est joué – et ce n’est pas un jugement partisan, je ne me l’autoriserais pas. Les critiques faciles seraient de dire que l’on reste encore trop axés sur le « pré carré », c’est-à-dire des relations avec les pays qui ont alimenté ce concept regrettable de « Françafrique ».

En outre,, dans ces mêmes pays, on constate bien que les concurrences économiques (mais pas seulement) sont fortes et font régresser l’influence de la France (Chine, Russie, Turquie, Brésil…) et du coup, contentent les interlocuteurs africains, qui perçoivent ces nouveaux partenariats comme des apports positifs en leur faveur, lors de ces Sommets nouveaux Pékin, Sotchi, etc.). Ces nouveaux partenaires s’embarrassant bien moins des mauvaises pratiques (Chinafrique ?...)

Et on en vient au point le plus difficile à explorer : l’attitude et la communication . Quelle attitude avoir devant ces chefs d’État ou ces gouvernements dont on sait que les méthodes – pour certains –, et le fonctionnement des États, n’évoluent toujours pas tellement dans le sens de la rigueur, de la droiture, de la démocratie, des Droits de l’Homme... bref de la gouvernance assainie, défaite résultant d’une certaine corruption ! Des élections, dont on sait qu’elles sont souvent verrouillées, ne sont synonymes que de tensions sécuritaires et de contexte éloigné du dialogue etc. !

Quelle attitude la France peut-elle avoir dans ces situations ?

Prendre ses distances ? mettre en garde ? durcir ses relations avec tel
ou tel État, et Chef d’État ? de quel droit ?

Cela est vite considéré comme « s’ingérer » (le ton employé au Liban, après l’explosion de Beyrouth, a été perçu ainsi par beaucoup). Ne rien dire, continuer à collaborer, sans réserve, à des partenariats où parfois les intérêts des États et de leurs dirigeants passent avant ceux des populations concernées ? Cela apparaît alors comme une sorte de cautionnement et est répréhensible aussi… Et c’est là que la Communication a son rôle à jouer.

Alors, la politique Africaine de la France doit être menée avec beaucoup de précautions, de réflexions, de stratégies, de concert avec d’autres pays Européens, ou étrangers… et ne pas oublier que la France, au-delà de sa relation historique avec le Continent, garde une vraie relation humaine et populaire avec l’Afrique, qui le lui rend bien.

Oui, c’est là où la communication, de part et d’autre, doit être soignée avec attention, pour que sa perception ne fausse pas les liens entre les populations ; elle doit être rénovée pour éviter les présentations de nos échanges comme seulement des aides ou assistance « comme avant », pouvant provoquer ce malaise dans les relations, mais plutôt comme de vrais partenariats « d’alliés ».

Et n’oublions pas, enfin, l’outil de coopération, essentiel lui aussi, dont on ne parle pas assez : celui de la Coopération décentralisée, de ville à ville, de Région à Région ou district, et aussi à l’apport de la Francophonie avec tous ses effets porteurs de progrès.
Ainsi, vous comprenez bien que l’on est loin d’une situation… d’orphelinat !

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DU MÊME AUTEUR :

 Alain Dupouy (O2A) : « L’Afrique n’est plus le synonyme systématique de catastrophes ou de malheurs ! » - 2 juin 2020

 L’après-Covid-19 en Afrique / Alain DUPOUY (O2A) : « C’est à la jeunesse africaine de jouer, maintenant ! » - 15 juin 2020

ARTICLE LIÉ :

 Réuni en forum à Paris, le club Objectif Afrique Avenir (O2A) prend acte de la nécessité d’améliorer la communication entre la France et l’Afrique - 21 mars 2020

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