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« Africa positive impact » : un livre-plaidoyer pour valoriser le management à la manière d’Afrique, cette « terre des possibles du monde à venir »

10 octobre 2020
« Africa positive impact » : un livre-plaidoyer pour valoriser le management à la manière d'Afrique, cette « terre des possibles du monde à venir »
Depuis des décennies, les message portés sur l’Afrique par nombre de « doctes » experts du management à l’anglo-saxonne ne font que nourrir un parti-pris folkloriste et disqualifiant. « Africa positive impact », ouvrage collectif d’une soixantaine d’universitaires, s’emploie à déconstruire ce cliché et à valoriser le « faire à l’Africaine ».

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par Alfred MIGNOT, AfricaPresse.Paris (AP.P)
@alfredmignot | @PresseAfrica

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Disons-le d’emblée : ce livre est l’une des bonnes surprises – livresques non littéraires – de la rentrée ! Ouvrage collectif produit par une vingtaine d’universitaires et coordonné par Soufyane Frimousse*, lui-même docteur en sciences de gestion et maître de conférences, il réussit le tour de force d’être agréablement lisible tout en développant une thématique où bien des auteurs font naufrage dans un entre-soi suffisant.

Ici, c’est tout le contraire, la fluidité de l’écriture renforce l’intérêt du questionnement au cœur de l’ouvrage : en quoi peut-on parler de management à l’africaine, sinon de modèle africain de management ?

Si les auteurs se défendent d’ambitions trop grandes, cet ouvrage-plaidoyer s’inscrit cependant bien dans le continuum, amorcé sottovoce voici déjà quelques années, de la contestation du dénigrement systématique du « faire à l’Africaine ».

Quand la littérature manageriale
marginalise l’Afrique

De fait, comme l’écrivait en décembre 2018 Soufyane Frimousse, « Dans une grande partie de la littérature managériale, les méthodes et les pratiques issues du continent africain sont ignorées ou considérées comme archaïques ou folkloriques. De ces transcriptions, apparaît ainsi une Afrique condamnée à la marginalisation. »

En s’opposant à cette vision réductrice par de nombreux exemples de réussites d’entreprises aux modèles éloignés de la doxa managériale d’inspiration essentiellement anglo-saxonne, l’ouvrage « Africa positive impact – Agir pour un meilleur impact sociétal » (dé)montre l’inventivité managériale de l’Afrique, capable de concilier tradition et modernité.

Les preuves par les exemples :
au Burkina, une fructueuse révolte des jeunes…

C’est par exemple le cas d’une Société d’exploitation minière (SEM) burkinabè (p. 116), dont l’évolution managériale illustre l’émergence d’une « intelligence sociétale » prenant en considération la culture de la population.

Ainsi, le chef coutumier du village participe pleinement à la cérémonie de lancement des travaux du site de production, c’est même lui qui donne le premier coup de pioche, symbolisant l’adhésion des communautés de riverains au projet entrepreneurial, auquel elles s’engagent à apporter leur protection et soutien. En contrepartie, cette entreprise étrangère à capitaux mixtes se doit de montrer respect et déférence à l’égard du chef de village, car elle fait désormais partie de la « famille » et doit donc participer aux événements, heureux ou malheureux, qui ponctuent la vie de la communauté.

Bien sûr, cette perception villageoise n’est pas complètement intégrée par les dirigeants de la SEM. Ainsi, un premier conflit survient lorsqu’ils décident d’embaucher quatre personnes sans avoir préalablement consulté le chef de village, comportement jugé offensant et provoquant le blocage des voies d’accès au site par la population…
Démontrant que les attentes de celle-ci n’étaient pas seulement financières (emplois, infrastructures locales), ce premier conflit met en lumière la forte attente de la population en termes de respect des usages, cultures et croyances. Surmontée, cette « révolte des jeunes du village » se révélera être la première étape d’une évolution comportementale des dirigeants de l’entreprise, jusqu’à l’établissement d’un « cadre de régulation sociale tripartite entre les CR, l’administration sociale et la SEM elle-même ».

… En Égypte, la réussite
de l’université Senghor d’Alexandrie

Un second exemple instructif – parmi bien d’autres qui pourraient être cités, de cette Afrique, « terre des possibles où s’esquissent les figures du monde à venir » (Soufyane Frimousse) – est celui de l’université Senghor d’Alexandrie (p. 256), dont la mission est de « former en français des cadres créatifs, capables de relever les défis du développement duable de l’Afrique ».
Un défi en passe d’être gagné, avec quelque 2 910 alumni diplômés depuis sa création en 1990, et une reconnaissance internationale établie pour la qualité de ses mastères, particulièrement ceux dédiés à la gestion de projet et au développement en Afrique.

« Réinventer en toute indépendance
le leadership africain »

Mais, au-delà des exemples concrets de réussites, qui abondent dans l’ouvrage, un chapitre y est consacré au cercle de réflexion Thinking Africa (p. 83), créé en 2003 avec l’objectif de « réinventer en toute indépendance le leadership africain ».
Reste que son chef de file, l’universitaire Saïd Abass Ahamed, expose dans l’entrevue qu’il a accordée aux auteurs, combien l’exercice est fragile dans cette Afrique où « ceux qui pensent sont marginalisés par ceux qui ont le pouvoir et craignent de le perdre. En fait, il est peut-être plus facile de penser l’Afrique à partir de Paris »…

D’autres informations, éparses au fil de l’ouvrage, rappellent au lecteur la difficulté gigantesque, inédite dans l’histoire de l’Humanité, dans laquelle se trouve aujourd’hui l’Afrique au regard de ses besoins de développement.
Car sa population, qui compte aujourd’hui 40 % de jeunes de moins de quinze ans, va doubler en une génération, passant de 1,2 à 2,5 milliards d’âmes, tandis qu’aujourd’hui encore le Continent est le plus déshérité du monde, avec 41 % de sa population vivant dans l’extrême pauvreté (Beegle et al., 2013), et alors même que le taux de croissance démographique dépasse celui de la croissance économique.

De la nécessaire « Alliance » Europe-Afrique

De ce simple fait, cette « terre des possibles où s’esquissent les figures du monde à venir », ainsi que l’évoque Soufyane Frimousse (p. 27) ne pourra advenir que si les partenaires de l’Afrique, au premier rang desquels l’Europe, contribuent activement à accélérer son développement, donnant ainsi vie à la nouvelle « Alliance » prônée par Jean-Claude Juncker, ancien Président de la Commission européenne et Président d’honneur de la Fondation La Verticale AME (Afrique Méditerranée-Europe) que préside l’ancienne ministre française Elisabeth Guigou.

Dans cette perspective, l’aboutissement positif espéré des négociations en cours de deux accords – Cotonou 2 (ACP) et Union africaine / Union européenne – constitueraient une avancée décisive pour la co-construction d’un avenir « partagé entre pairs » des deux continents.

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* Soufyane Frimousse est Docteur en Sciences de Gestion, Maître de conférences (IAE de Corse, UMR LISA), Chercheur associé Chaire Changement, ESSEC Business School Paris.

« Africa positive impact – Agir pour un meilleur impact sociétal »
Coordonné par Soufyane Frimousse.
Collection ASMP – Académie des Sciences du Management de Paris
432 pages – Versions papier (34 €) et digital (24,99) en commande possible chez l’éditeur :
www.editions-ems.fr
https://www.editions-ems.fr/livres-2/collections/academie-des-sciences-de-management-de-paris/ouvrage/591-africa-positive-impact.html

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ARTICLES LIÉS :

- Innovations frugales, ethos, management… : 
comment l’Afrique devient le laboratoire du monde de demain, un ouvrage de Soufyane Frimousse - 2 décembre 2018

- Soufyane Frimousse (Chercheur associé EBS Paris) : « Quand l’Afrique s’éveillera… le management tremblera ! » - 4 avril 2020

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